Personne ne l’a encore vue. Elle est désormais sous protection policière dans un lieu tenu secret. Les médias français croient savoir qu’elle s’appelle Nafissatou Diallo. Aux Etats-Unis, personne ne mentionne son identité –comme souvent dans ce genre d’affaire, la justice souhaitant préserver la sécurité et la vie privée de la victime. Selon la copie du rapport de la police de New York (NYPD) diffusée lundi par le site Atlantico, elle serait «de race noire, âgée de 33 ans». Les premières rumeurs, reprises par «France soir», Une femme de ménage "d'origine latino" | France Soir faisaient état d’une jeune femme «d’origine latino». Puis le «Wall Street Journal» a évoqué les origines guinéennes de la victime –une information reprise par Guineenews.org. La radio Europe 1, elle, parle d’une mère de famille d’origine ghanéenne. Mère célibataire de deux enfants selon le WSJ, elle réside dans le Bronx avec sa fille Dana, âgée de 16 ans, précise Europe 1. Toutes deux habiteraient dans un petit appartement situé au 4e étage de cet immeuble en brique rouge qui en comporterait six, situé dans le cœur de ce quartier populaire. La cage d’escalier serait «délabrée, l’ascenseur un peu bringuebalant». Elles s’y seraient installées l’hiver dernier.
«Elle travaille au Sofitel New York depuis trois ans», a fait savoir le directeur général de l'hôtel Sofitel Jorge Tito, qui s’est dit «entièrement satisfait de son travail et de son comportement». Le groupe Accor aurait indiqué que l’employée modèle était «notée 4,5 sur 5» par la direction du Sofitel de Time Square, rapporte «Le Monde». Pour le reste, les témoins décrivent une femme discrète et timide. «Elle est toujours très calme. Je ne l’ai jamais vue s’énerver», déclare un voisin à la radio. «Je la croise quand elle part travailler ou parfois quand elle rentre. Mais je vois surtout sa fille, une fille très sympa. Et sa mère est vraiment gentille. Ça a été un sacré choc», poursuit-il. Même réaction d’une autre voisine, résidant deux étages plus bas que Nafissatou Diallo. «Je pense qu’elle ne méritait vraiment pas ça», déplore Rosa. «Voyez ce que cet homme lui a fait. Il ne mérite pas d’être un jour président. Je l’ai vu dans le journal. C’est comme s’il n’avait aucune compassion pour elle. Rien du tout», estime-t-elle. Même son de cloche encore du côté des sources d’i>Télé. «Ce sont de bonnes personnes, a déclaré l’un voisin. Elle n'a jamais créé de problème. Elle est très discrète.»
«Elle a peur des gens»
Un certain Mark Gangadeen, un commerçant du quartier âgé de 47 ans, considéré par le «Daily Mail» comme probablement l’un des seuls qui conversait parfois avec la présumée victime, ces derniers mois, précise que cette dernière a «peur des gens»; qu’elle était «une bonne mère» et qu’elle souriait peu. Selon lui, «elle avait très peur des chiens de son voisin et elle ne disait pas bonjour à moins qu’on ne lui dise» en premier. Elle était «renfermée sur elle-même», et il pense que cela ne va pas s’arranger après ce qu’il s’est passé. Sa vie tournait autour de sa fille adolescente et de son travail qui lui permettait tout juste de joindre les deux bouts. «Ma mère était une femme battue, confie-t-il, et les femmes à qui il arrive ce genre de choses deviennent sur la défense et introverties.» «La connaissant, (…) elle va tout garder pour elle», craint-il. Mark Gangadeen n’envisage pas une seconde qu’elle ait menti. «Ce n’est pas son genre. (…)Pourquoi ferait-elle cela?», s’est-il interrogé. «Connaissant son comportement, je la crois, insiste-t-il. Il a dû lui arriver quelque chose de vraiment grave pour qu’elle fasse de telles accusations.»
Physiquement, les témoignages divergent. Les avocats de DSK auraient déclaré avoir été surpris de découvrir le visage «très peu séduisant» de l’accusatrice, à la comparution au cours de laquelle elle a formellement identifié celui qu’elle désigne comme étant son agresseur, rapporte RMC... Dans les colonnes de «France Soir», un chauffeur de taxi indien appelé Sony indique au contraire que le voiturier de l’hôtel lui aurait «dit que cette femme de ménage était une trentenaire très jolie, qu'elle avait de gros seins et de belles fesses.» Un des informateurs d’Europe 1 évoque aussi une femme «plutôt jolie». D'habitude, précise Mark Gangadeen, cette musulmane portait un pantalon de couleur foncée, un foulard sur la tête avec un imprimé tribal, et des chaussures plates.
«Deux jours à pleurer»
Elle aurait passé «deux jours entiers à pleurer», selon son meilleur ami, qui s’est confié à RMC. Une information qui corrobore celle du «Courrier Picard», selon laquelle une caméra de vidéosurveillance de l'hôtel ayant filmé la femme de chambre en train de sortir de l’établissement, la montrerait «en état de choc, légèrement paniquée». Selon ce même ami, Nafissatou Diallo ignorait complètement qui était DSK avant de le découvrir en regardant les nouvelles à la télévision le soir de l'arrestation du patron du FMI. On ignore si elle retournera ou non travailler à l’hôtel. Si oui, une de ses collègues a dit au «New York Times» que la direction de l'hôtel avait demandé à son personnel «de ne pas lui poser de questions sur ce qui s'est passé. Juste de lui montrer [leur] soutien quand elle reviendra».
Face à l’indignation de nombreux politiques français devant le traitement réservé à Dominique Strauss-Kahn, plusieurs défenseurs des droits de femmes rappellent, que jusqu’à preuve du contraire, ce n’est pas lui la victime. Clémentine Autain, ex-adjointe du maire de Paris, elle-même violée à l’âge de 22 ans, regrette notamment qu’il y ait «beaucoup de témoignages en faveur de DSK, mais peu de messages de compassion pour cette femme de chambre qui accuse le patron du FMI.» Au vu du peu d’éléments dont nous disposons, «il n’est pas exclu qu’une femme ait été victime d’un viol dans cette suite du Sofitel», souligne-t-elle. Cette militante au sein de la Fédération pour une alternative sociale et écologique, qui s’est exprimée sur France Info ce matin, appelle les Français à avoir un peu plus d’égards «pour cette femme invisible (…) au nom de toutes les victimes de violences sexuelles qui ont énormément de mal à parler». Dominique Strauss-Kahn, qui a passé sa première nuit en prison, a été inculpé de sept chefs d'accusation, parmi lesquels tentative de viol, agression sexuelle, attouchements non consentis ou encore emprisonnement illégal. Il encourt jusqu'à 74 ans et 3 mois de prison.