"Pourquoi on m'a laissée brûler ?"
Témoignant à l'audience par vidéo, Mama Galledou, brûlée dans l'incendie criminel d'un bus à Marseille, a demandé à ses agresseurs de s'expliquer. En vain.
Aux questions précises qu'elle leur a posées, les adolescents n'ont pu apporter aucune vraie réponse.
- le 27/09/2007 - 15h33
La jeune femme est arrivée discrètement jeudi matin au tribunal de grande instance de Marseille. Mama Galledou, 27 ans, brûlée à 62% de la surface du corps dans l'incendie criminel d'un bus à Marseille en octobre 2006, a témoigné toute la matinée au procès de deux de ses agresseurs présumés. Mais la victime n'a pas souhaité faire face aux prévenus : elle a donc été installée dans la bibliothèque du tribunal de grande instance de Marseille, situé dans un bâtiment annexe du Palais de justice, où se déroule le procès à huis clos. Là, accompagnée d'un greffier, de l'un des avocats de la défense et d'une équipe technique, elle a raconté son calvaire, cadrée en plan serré, sans que sa déposition soit enregistrée.
La jeune femme ne voyait sur son écran de contrôle que le visage du président du tribunal. Car ses conditions étaient claires : elle ne voulait pas voir le visage de ses agresseurs présumés. "Elle ne s'est pas effondrée. Elle était poignante, touchante, authentique et volontaire", a expliqué son avocat, Me Alain Molla, à la sortie de l'audience. "Mais cela s'est très mal passé car elle n'a obtenu aucune réponse à ses interrogations. Elle a posé des questions précises et cela n'a déclenché aucune réponse chez ses agresseurs".
"A quoi vous pensiez lorsque vous êtes partis ?"
Face au visage cadré de leur victime, les deux adolescents sont demeurés murés dans le silence et se sont contentés de renouveler leurs regrets. "Même s'ils ont participé à un acte abominable, ce ne sont que des enfants. Ils n'ont pas la capacité de s'exprimer autrement", a plaidé Me Michel Lao, le défenseur de l'entre eux. "Les questions étaient légitimes, mais les réponses difficiles à apporter". Pendant près d'une heure pourtant, la victime a directement demandé des explications précises à ses agresseurs. "Qui a mis le feu bien sûr, mais aussi comment ce groupe s'est organisé pour en arriver là ?", a précisé son avocat. "Eux refusent de parler de ce projet fou de mettre le feu à un bus", a-t-il dit. "Pourquoi on m'a laissée brûler, à quoi vous pensiez lorsque vous êtes partis en m'abandonnant ?" a encore demandé Mama Galledou à ses agresseurs, sans obtenir de réponse.
La même frustration de ne pouvoir obtenir une "exigence minimale de vérité" a été ressentie par les autres avocats des parties civiles. "C'est désespérant de ne pas arriver à arracher un bout de vérité de la bouche d'un adolescent", a déploré Gilbert Collard, l'avocat de la conductrice du bus. "On a affaire à des jeunes qui ont la tête dure comme des murs de prison. Plus la souffrance est grande, plus l'exigence de vérité est nécessaire et plus le silence qu'on y oppose est insupportable", a-t-il poursuivi.
Mama Galledou devrait assister, dans les mêmes conditions, à la plaidoirie de ses avocats prévues en milieu d'après-midi. Les deux accusés bénéficient de l'excuse de minorité et encourent quinze ans de réclusion. Les six autres prévenus comparaîtront du 3 au 7 décembre devant la cour d'assises des mineurs des Bouches-du-Rhône et encourent une peine de trente ans de prison.
souces LCI