je suis tout a fait d accord avec cela la polygamie peut créer des clans et des tensions entre demi- freères et soeurs. Par contre, cela n' empeche la reussitte car elle dépend pas de chaque permis.
Polygamies hexagonales
Toute l'actualité avec Libération
En France, des milliers de ménages vivent une conjugalité polygame, illégale. Difficultés économiques, tensions entre épouses, logements exigus ou vie «ordinaire» Des familles témoignent.
36 réactions
Par MARWAN CHAHINE
Ibrahima Diallo a 54 ans. Il vit à Montreuil-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) dans un F5 avec ses deux femmes, Aïssata et Djeneba, et leurs 13 enfants. Ibrahima a choisi d’épouser plusieurs femmes «parce que c’est la coutume ; que l’islam l’autorise, mais surtout parce que j’ai beaucoup de plaisir à avoir une très grande famille et plein de monde chez moi».
En plus de la famille, les Diallo reçoivent aujourd’hui des cousins et des amis des enfants, invités à partager le foyo, couscous malien à base de semoule de mil. Chauffeur-livreur, Ibrahima gagne 1 500 euros par mois, auxquels viennent s’ajouter 1 000 euros d’allocations familiales. «C’est parfois difficile, mais j’assume mon choix», assure-t-il. L’homme parvient même à mettre un peu de côté pour son village au Mali, où vit une troisième femme, la veuve de son frère, qu’il a épousée par tradition mais avec laquelle il n’a pas d’enfant. Ibrahima n’ignore pas que la question des allocations est épineuse. A ses yeux, elle constitue la raison principale pour laquelle la polygamie est interdite en France : «Quand je suis né, le Mali était français et ça n’embêtait personne qu’on épouse plusieurs femmes.»
Inquiétudes et fantasmes
Une grande majorité des polygames vivant en France sont originaires de ce pays, d’autres viennent du Sénégal ou de la Mauritanie, très peu du Maghreb. Contrairement à ses épouses, Ibrahima n’a pas la nationalité française.
Affable et chaleureux, l’homme élude les questions lorsqu’on évoque la place et la liberté des femmes dans un ménage polygame. Aïssata, sa première épouse, fait une moue ironique quand son mari assure qu’il lui a demandé son avis avant de se remarier. La deuxième épouse, Djeneba, n’habite plus l’appartement. En théorie. Dans les faits, après avoir divorcé afin de se conformer à la loi et obtenir des papiers, Djeneba, qui vit à proximité, continue à venir très régulièrement et a gardé sa chambre. Ibrahima alterne quotidiennement les nuitées entre ses deux femmes. «Il est normal que ce soit l’homme qui se déplace et non l’inverse, explique-t-il. C’est pour ça que ça se passe bien chez nous.» En plus de l’équité, le devoir de subsistance est une des conditions sous lesquelles l’islam autorise la polygamie.
Dounama, 25 ans, fils aîné de la fratrie tempère un peu le tableau idyllique de son père, mais reste positif. Certes, enfant, il a essuyé des moqueries ; l’appartement n’est pas le lieu idéal pour faire ses devoirs ; l’arrivée de sa belle-mère alors qu’il avait 8 ans n’a pas été évidente, mais, avec du recul, Dounama juge que cela ne l’a pas entravé dans son développement : «Ce qu’on perd en affection, on le gagne en sens du partage et de la collectivité.» Aujourd’hui employé de la Poste, il aide financièrement sa famille ; «par choix», précise-t-il. Pour expliquer le bon fonctionnement du ménage, il loue «le goût du dialogue de [son] père et le courage de [ses] mères». Doumana ne souhaite pas imiter le modèle familial et établit une distinction nette entre «la culture africaine et polygame de mon père et ma culture française monogame». «C’est une famille où il n’y a pas plus de problèmes que dans des familles monogames dans la même situation sociale, estime pour sa part Geneviève Muscat, responsable associative, qui a longtemps côtoyé les Diallo. Une des clés de la réussite est sans doute que les femmes sont bien intégrées. Elles ont suivi des cours d’alphabétisation, participent aux activités de quartier et sont attentives à l’évolution des mômes.»
Mais la polygamie - ou plus précisément la polygynie (situation d’un homme ayant plusieurs épouses), inverse de la polyandrie - ne se vit pas toujours aussi bien. L’Institut Montaigne, think-tank de tendance libérale, a récemment publié une note alarmiste sur la question. Son auteure, Sonia Imloul, fondatrice de l’association Banlieue 93 et militante du Nouveau Centre, y soumet dix propositions pour combattre la polygamie qu’elle juge potentiellement dangereuse «pour l’organisation sociale et destructrice pour les enfants et les femmes qui la subissent». Le sociologue Christian Poiret - auteur de la thèse les Familles africaines en France - nuance. Selon lui, même si beaucoup de situations sont difficiles, «la note de Sonia Imloul ne sort pas d’une logique victimisante et ne prend pas en compte la complexité des vécus». Constat semblable de Mamadou Diarra, médiateur éthnoclinicien au centre Georges-Devereux, qui reçoit de nombreux enfants de migrants : «La polygamie n’est pas, en soi, traumatisante pour les enfants. Cela dépend beaucoup de la relation entre les épouses et des conditions socio-économiques de la famille.»
En France, la polygamie nourrit des inquiétudes, parfois des fantasmes. Pendant les émeutes de 2005, Bernard Accoyer, aujourd’hui président de l’Assemblée nationale, voyait dans la polygamie «certainement une des causes des violences urbaines». Pour Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, c’était une des raisons pour lesquelles un Africain s’intégrait «moins bien qu’un Hongrois». L’historienne Hélène Carrère d’Encausse, secrétaire perpétuelle de l’Académie française, avait pour sa part expliqué les émeutes à la télévision russe : «Beaucoup de ces Africains sont polygames. Dans un appartement, il y a trois ou quatre femmes et 25 enfants. Ils sont tellement bondés que ce ne sont plus des appartements, mais Dieu sait quoi ! On comprend pourquoi ces enfants courent dans les rues.»
«Donner à penser que les problèmes actuels des banlieues seraient directement liés à la polygamie est gênant, voire insupportable», avait alors répondu le maire socialiste d’Evry, Manuel Valls. Même ses plus ardents détracteurs reconnaissent que la polygamie ne saurait être à l’origine des maux français. Lui-même fils de polygame, Jean-Marie Ballo, préside l’association de médiation culturelle Nouveau Pas aux Ulis (Essonne). Il porte un jugement très sévère sur ce qu’il considère «comme un archaïsme, qui ne relève pas même de la culture mais de la simple pratique coutumière et réduit la femme au rôle d’objet». Cet ancien éducateur sportif admet cependant que le phénomène, «même s’il peut être un facteur aggravant», reste marginal.
Une étude de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) parue en 2006 estime qu’il y aurait entre 16 000 et 20 000 familles polygames résidant en France, en situation régulière ou non, soit environ 180 000 personnes (0,28% de la population française). Parallèlement à sa note, Sonia Imloul, qui s’appuierait sur des estimations policières, a chiffré à 500 000 le nombre de personnes concernées. «Un chiffre fantaisiste», pour le sociologue Christian Poiret qui juge «impossible de quantifier un phénomène complexe où la mobilité est telle que les écarts sont trop grands pour être significatifs». En effet, un ménage polygame est souvent éclaté entre la France et le pays d’origine.
La «décohabitation»
Le droit français n’a jamais autorisé le mariage avec plusieurs femmes mais, entre 1980 et 1993, un arrêt du Conseil d’Etat a permis le regroupement familial pour les ménages polygames. Les lois Pasqua de 1993 ont mis fin à cette jurisprudence. Pour être en règle, les épouses secondaires doivent donc divorcer et quitter le foyer : c’est la «décohabitation». Cette pratique est soutenue par des municipalités et des associations féminines d’aide car elle peut permettre aux femmes de s’affranchir. Elle n’est pourtant pas sans poser problème.
Après quinze ans de mariage comme deuxième épouse, Mariam a divorcé. Un choix fait pour obtenir des papiers mais aussi parce que la situation n’était plus vivable. Avec les enfants de la première épouse, ils étaient 15 à loger dans un F3 à Saint-Denis, dans un esprit tendu où des clans s’étaient formés. «Un seul W.-C. pour tout le monde, ça n’est pas possible !» dit-elle avec humour pour résumer cette douloureuse période. Mais le divorce n’a pas été synonyme de libération immédiate. Pendant trois ans, sans véritable autonomie financière, maîtrisant mal le français, Mariam a vécu à l’hôtel dans les Hauts-de-Seine tout en continuant à amener quotidiennement ses enfants à l’école en Seine-Saint-Denis, avec l’espoir d’un dénouement rapide. Et une grande culpabilité lorsque les petits réclamaient leur père. Aujourd’hui, Mariam a des papiers et habite un F5 avec ses 6 enfants. Les rapports avec son ancien mari se sont apaisés. Il leur rend visite, de temps en temps. Mariam a envisagé de refaire sa vie avec quelqu’un d’autre mais y a renoncé face à la pression de ses enfants. Plus sereine, elle n’en reste pas moins marquée par son expérience : «Si j’avais su que ça se passerait comme ça, je serais restée au Mali.»
Dans ses démarches, Mariam a été accompagnée par l’association des femmes relais de Bobigny et sa présidente, Fanta Sangare. Cette assistante sociale est d’autant plus sensible aux problèmes liés à la polygamie qu’elle l’a elle-même vécue. Encore étudiante au Mali, elle est mariée à un homme de dix ans son aîné. Jeune mais instruite, Fanta exige un mariage monogamique, le code civil malien offrant les deux options. Le mari, haut fonctionnaire, accepte mais se ravise au dernier moment car, dit-elle, «un homme a besoin de montrer qu’il a des couilles, qu’il domine». «J’ai terminé mes études et je suis devenue institutrice avant que nous cohabitions mais, entre-temps, il s’était entiché d’autres femmes. Nous avons eu cinq enfants ensemble, mais je n’ai jamais accepté la situation et j’ai fait vivre un enfer à mes coépouses.» En 1991, Fanta décide de fuir avec ses deux plus jeunes enfants pour la France, où vit son père. Le vieil homme, très pieux et attaché aux traditions, l’exhorte à rentrer au Mali. De retour au pays, Fanta engage une procédure de divorce. Elle revient en France, seule, et commence à s’investir dans des associations de femmes. Elle obtient le divorce en 1996 et la garde des enfants en 2000, malgré des menaces de mort de son ex-mari.
«Simple rideau»
De son histoire, Fanta tire un engagement ferme contre la polygamie. «Si ça peut être supportable au Mali, dans un système traditionnel où chaque femme a un espace privé, c’est très difficile en France en raison notamment de la forme de l’habitat : comment voulez-vous qu’une femme garde sa dignité quand elle n’est séparée de sa coépouse que par un simple rideau ?» s’emporte-t-elle. Malgré son ressentiment, elle s’efforce de nouer des liens avec les maris polygames et de ne pas juger les femmes qui s’accommodent de la situation : «Elles sont tellement courageuses !»
Cet article a reçu le prix René-Mauriès, qui recompense chaque année un étudiant en journalisme.
Dessin Olivier Marboeuf
Sachez vous entourer de personnes qui vous tire vers le haut!
je suis tout a fait d accord avec cela la polygamie peut créer des clans et des tensions entre demi- freères et soeurs. Par contre, cela n' empeche la reussitte car elle dépend pas de chaque permis.