Dans une vie obscure ensevelis-toi : ce qui pousse avant d'être mis en terre ne parvient pas à maturité.
(Hikam de Ibn 'Ata Allah)
Le terme "S'ensevelir" signifie se dissimuler et se cacher.
"L'obscurité", c'est perdre la position que l'on a auprès des gens.
L'expression "Ce qui pousse" est une métaphore pour les sagesses, les dons et la connaissance que l'esclave obtient d'Allah.
Cette hikma veut dire le murid pour progresser dans la Voie doit rechercher la sincérité et que la sincérité ne peut être atteinte qu'en méprisant son âme et en rejetant l'envie qu'à l'âme d'attirer la bonne opinion sur elle.
La recherche du prestige et de la bonne opinion des gens est un poison mortel qui bloque le disciple en l'empêchant d'être sincère envers Dieu.
Ibn 'Ajiba écrit :
Murid, cache ton âme et enterre-là dans l'obscurité jusqu'à ce que cette situation lui devienne normale, jusqu'à ce qu'elle en soit heureuse et trouve cela plus doux que le miel, et jusqu'à ce que le fait de se montrer lui paraisse plus amer que le coloquinte.
Quand tu enterres ton âme dans la terre de l'obscurité et que ses racines s'enfoncent profondément, alors, tu recevras les fruits et les richesses: le secret de la sincérité et la réalisation de la station de l'élite de l'élite.
Si tu n'enterres pas ton âme dans l'obscurité et que tu l'autorises à se montrer, l'arbre va mourir et le fruit va tomber. (…)
Sayyiduna 'Isa, sur lui la Paix, demanda à ses compagnons, "Quand le grain pousse-t-il ?" Ils répondirent: "Quand il est dans la terre". Il dit alors : "C'est pareil pour la sagesse. Elle ne pousse que dans le cœur qui est comme la terre."
Un des Connaissants a dit : "Quand tu enterres ton âme de plus en plus profondément, ton cœur s'élève de degré en degré."
Ibrahim Ibn Adham a dit: "La personne qui aime être populaire n'est pas juste avec Allah."
Ibn 'Ata Allah a rapporté dans ses sagesses :
"Les gens te louent pour ce qu'ils t'imaginent être. Mais toi, blâme ton âme pour ce que tu connais d'elle."
Il a dit aussi:
"Ton désir que les gens connaissent ton Election : signe que tu n'es pas sincère dans tes dévotions."
Un jour, le Messager de Dieu, qu'Allah prie sur lui et le salue, était assis avec al-'Aqra ibn Habis, un notable des Banu Tamim, quand des pauvres musulmans passèrent près d'eux. Le Prophète demanda à al-'Aqra : "Que penses-tu de celui-là ?"
Il répondit: "Messager de Dieu, c'est un pauvre parmi les autres. S'il demanda une femme en mariage, sa demande ne sera pas acceptée, s'il vient intercéder pour quelqu'un, son avis ne sera pas écouté, et s'il parle, on ne l'écoutera pas."
Plus tard, un homme riche passa près d'eux et le Messager de Dieu, qu'Allah prie sur lui et le salue, demanda: "Et que penses-tu de celui-là ?". Il répondit: "S'il fait une demande en mariage, sa proposition sera acceptée, s'il intercède pour quelqu'un, son avis sera écouté, et s'il parle, on l'écoutera."
Le Messager de Dieu dit alors: "Celui-ci (le pauvre) est meilleur que ce que la terre contient et il est meilleur que celui-là (le riche)."
L'Imam Suyuti, rapporte dans son Jami' as-Saghir, que le Prophète, qu'Allah prie sur lui et le salue, a dit : "Le mal est déjà là pour un homme quand on le montre du doigt soit pour une affaire de ce bas monde, soit pour une chose qui concerne l'autre monde."
Abu Hurayra rapporte que le Messager de Dieu, qu'Allah prie sur lui et le salue, a dit: "Peut-être qu'une personne avec des cheveux ébouriffés et des vêtements en lambeau qui est répugnant aux yeux des gens, mais s'il prie Dieu, il sera exaucé."
Abû Hafs de Nishapur a dit: "Celui qui a beaucoup de science considère la plupart de ses œuvres comme ayant peu de prix parce qu'il est conscient de ses imperfections dans leur accomplissement, tandis que celui qui a peu de science grossit l'importance de la moindre de ses œuvres parce qu'il n'y voit pas ses insuffisances et ses défauts."
Sulami rapporte une histoire qui est arrivée à Bishr al-Hafi, surnommé le "Va-nu-pieds" par tout le monde, à cause de son ascétisme.
Celui-ci raconte:
"Je m'étais rendu chez al-Mu'âfâ ibn 'Imrân, et je frappai à la porte. Quand on me demanda qui était là, je répondis: "C'est Bishr", mais, et ce fut plus fort que moi, j'ajoutai "le Va-nu-pieds". J'entendis alors la voix d'une petite fille à l'intérieur de la maison, qui me cria : "Hé ! Mon vieux, si tu mettais deux sous dans l'achat d'une paire de sandales, tu serais débarrassé de ce nom."
Une histoire est rapportée par Abu Yazid al-Bistami:
Il eut un disciple qui resta avec lui pendant trente et qui ne le quittait jamais.
Un jour il lui demanda: "Maître, pendant trente ans, j'ai jeûné le jour et j'ai prié durant la nuit, mais je n'ai pas trouvé ce dont tu as parlé, pourquoi ?"
Abu Yazid lui a répondu :" Parce que tu es voilé par ta nafs."
"Est-ce qu'il existe un remède pour retirer les voiles ?"
Abu yazid répondit "Oui, mais tu ne vas pas l'accepter."
Le disciple lui dit: "Dis-le moi, et je ferai ce que tu me demandes."
"Va de suite chez le coiffeur et fais-toi raser la barbe et les cheveux. Enlève tes habits et mets un manteau en laine. Accroche une sacoche à ton cou et remplie la de noix. Réunie les enfants autour de toi et crie d'une voix forte:"Les enfants ! je donnerai une noix à celui qui me donne une baffe !" Ensuite entre dans un marché où tu es connu et respecté, jusqu'à ce que tous les gens que tu connais te voient."
Le disciple s'exclama : "Abu Yazid, gloire à Dieu ! Est-ce que tu me dis cela pour que je le fasse ?" Abu Yazid répondit :"Ta parole "Gloire à Dieu" est de l'association."
"Pourquoi ?"
"Parce que tu as de l'estime pour ton âme et donc tu la glorifie."
Le disciple continua : "Abu Yazid, je ne peux pas faire ce que tu m'as demandé, mais demande moi autre chose et je le ferai."
Abu Yazid le répondit: "Commence avec çà jusqu'à ce que ton estime de toi-même s'abaisse et que ton âme s'humilie, ensuite, je te dirai quoi faire."
Il dit: "Je ne peux pas faire cela."
"Tu m'as dit que tu accepterais de faire ce que je te dirais de faire. Je sais qu'une personne n'obtient aucun secret du monde invisible qui est caché aux autres personnes tant qu'il ne tue pas sa nafs et qui romps les habitudes des gens ordinaires. Alors, le cours normal des choses sera changé pour lui et les bénéfices apparaîtront."
Le Shaykh Abu Talib al-Makki a écrit :
"Quand le serviteur devient humble intérieurement et se considère lui-même comme peu de chose, et qu'il ne trouve dans l'humilité aucun goût et dans son abaissement aucune sensation, alors l'humilité et l'abaissement deviennent une partie de lui-même. Une telle personne ne craint pas le blâme des gens et n'aime pas recevoir les louanges, car il sait qu'il n'a rien par lui-même."
Du site saveurs soufies