Les thèmes de l’immigration et de l’influence de la tradition en Afrique étaient omniprésents dans la plupart des films du Fespaco
Les thèmes de l’immigration et de l’influence de la tradition en Afrique étaient omniprésents dans la plupart des films prétendant au grand prix du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou, dont la XXe édition s’est achevée samedi. Dans des approches différentes, au moins un film sur deux, parmi les 20 longs-métrages évoque ces deux sujets.
"Ce sont des sujets incontournables dans une Afrique pauvre, gardienne de ses coutumes et obligée de subir la mondialisation", estime Mansour, un festivalier venu du Nigeria.
Teranga Blues du Sénégalais Moussa Sène Absa, Africa Paradis du Béninois Sylvestre Amousso ou Un matin bonne heure du Guinéen Gahité Fofana abordent l’immigration clandestine, qui préoccupe dirigeants d’Afrique et d’Europe (lire aussi éditions précédentes). "C’est le sort d’une Afrique dont la jeunesse se meurt dans les océans, à qui on ne fait rien pour qu’elle reste chez elle", explique Moussa Sène Absa, justifiant les raisons de son choix de ce thème.
Teranga Blues raconte l’histoire d’un émigré clandestin qui, après son expulsion de France, se lance dans un juteux trafic d’armes, avant de mourir dans les bras de sa mère à l’issue d’un règlement de comptes. Dans Africa Paradis, l’immigration est montrée dans le sens inverse des réalités actuelles - d’une Europe pauvre vers une Afrique prospère. Un scénario traité avec dérision pour, selon Sylvestre Amoussou, braquer "les projecteurs sur le racisme, la xénophobie, l’intolérance".
Le fléau est décrit de manière plus tragique dans Un matin bonne heure, chronique inspirée de faits réels avec la tentative d’émigration clandestine de deux adolescents guinéens, Yaguine et Fodé, en 1999.
Voulant fuir la misère dans leur pays, les deux garçons s’étaient cachés dans le train d’atterrissage d’un avion où ils ont été retrouvés morts à Bruxelles. "Ce film montre le visage de dénuement absolu chez nous", assure un cinéphile guinéen. L’influence des coutumes, autre thème majeur au Fespaco, est décrite avec de nombreux détails dans deux des trois longs-métrages en lice pour le Burkina Faso, un des nombreux pays ouest-africains où mariage forcé, excision et lévirat ont encore la vie dure. Madi Kaboré, spectateur burkinabé, semble abasourdi par la trame développée dans Djanta, de Tahirou Tasséré Ouédraogo. "Comment, de nos jours, un père peut-il donner sa fille âgée de 22 ans qui entame des études universitaires à un octogénaire resté au village?", s’interroge-t-il.
Il va pleuvoir sur Conakry, du Guinéen Cheick Fantamady Camara met aussi à nu une Afrique déboussolée, par la confrontation de deux mondes : celui de BB, journaliste et talentueux caricaturiste, contre celui de son très conservateur père, imam de la mosquée de Conakry, capitale de la Guinée. Faro, la reine des eaux du Malien Salif Traoré pose un regard critique sur les croyances africaines, à travers la place de l’enfant adultérin dans la société. Le choix dans ces films d’un mélange de musique rap et de chants folkloriques symbolise également l’Afrique en quête de repères.
Source : http://lejournal.euskalherria.com