Avec le cumul des siècles d'interpénétration des peuples, d'histoire partagée par les habitants de la planète, les migrations humaines se trouvent aujourd'hui au cœur même de l'évolution et de l'avenir du monde moderne.
La complexité du problème exige dès lors une approche pluridisciplinaire et collective. Étroitement liée aux questions des droits de l'homme, de liberté et de développement, la question ne peut être résolue par une accumulation de lois, la répression, surtout tant que s'accentuera le déséquilibre entre pays pauvres et riches.
L'immigration est devenue aujourd'hui un thème de campagne pour certains leaders politiques des pays d'accueil. C'est pourquoi le Conseil des Maliens d'Espagne a organisé jeudi dernier dans les locaux de l'Institut national des travailleurs sociaux à l'hippodrome une conférence-débat sur le thème : "l'immigration clandestine en Europe, faits et réalités vécus par les Africains, l'exemple de l'itinéraire espagnol".
Le principal conférencier Moussa Sidibé, l'un des responsables du Conseil des Maliens en Espagne, a rappelé que son organisation s'attache à recenser tous nos compatriotes vivant en Espagne et à leur venir en aide en cas de difficultés.
Le 28 février 2002, le Conseil des ministres de l'Union européenne a adopté un plan global contre l'immigration clandestine. Ce plan prend en compte l'entrée en vigueur des accords de rapatriement signés avec un certain nombre de pays et incite d'autres États non signataires à y adhérer. Et depuis, les conditions de vie en Espagne des Africains sont devenues pénibles, assure Moussa Sidibé.
En outre, la loi qui interdit d'employer les "sans papiers" cause d'énormes difficultés et les rares clandestins embauchés perçoivent un salaire de misère et vivent dans une situation de dépendance totale vis-à-vis de leurs employeurs. Selon Moussa Sidibé, les "sans papiers" sont "disponibles, peu coûteux et vivent dans l'incapacité de réclamer leurs droits", bref ils sont taillables et corvéables à merci. À la difficulté d'emploi viennent s'ajouter celles de logement. Les immigrés s'entassent dans des maisons appelées "Cama caliente", l'équivalent de ce que l'on appelait en France les "lits chauds" pour désigner une couchette qui n'a pas le temps de refroidir car elle est louée à deux occupants qui l'utilisent en alternance.
Moussa Sidibé critique au passage les marchands d'illusions qui font miroiter l'eldorado aux candidats à l'immigration clandestine. Il exhorte à ce propos les jeunes Africains en général et les Maliens en particulier à être créatifs, à poursuivre leurs études et à réfléchir avant de prendre le périlleux chemin de l'immigration.
L'assistance a aussi écouté avec émotion le récit émouvant de Mady Fofana. Celui-ci pour atteindre l'Espagne aura passé une dizaine de jours dans le désert et autant sur l'océan. À bout de force à l'arrivée, il a été mis à la disposition de la Croix Rouge.
La projection d'un film sur les conditions d'accès en Espagne est venue confirmer les propos de Mady Fofana. Pour le directeur de l'INFTS, le Pr Sidiki Traoré, cette conférence-débat est utile car elle permet à tout un chacun de prendre conscience du phénomène de l'immigration clandestine.