On dit que la guérison des grands garçons est plus lente que celle des plus jeunes, c'est pourquoi la période de circoncision peut durer jusqu'à deux mois ou plus. Le dernier jour, tout le monde va se baigner au fleuve et les habits de la cérémonie de prise du pantalon sont déjà prêts : ceux qui sont grands "prendront" le pantalon, les plus petits resteront en xeto (culotte en coton pour non circoncis...). Ceux qui ont pris le pantalon circulent dans la ville exhibant leur nouvelle tenue devant les yeux émerveillés de leurs nombreux admirateurs ; mais les filles de leur fedde se moquent d'eux en leur lançant la célèbre chanson des guirikuto .
Giri kotti kotti,
Saxe da kotti
Fabe da kotti.
Selon notre oncle : "celui qui prend son pantalon invite tout le fedde pour passer la journée chez lui, ils y prennent le déjeuner et le dîner après, ils bénissent celui qui a invité ensuite ils se séparent."
Quant aux filles du fedde, elles étaient actuellement excisées individuellement et dès leur plus jeune âge, alors qu'auparavant, on attendait qu'elles grandissent pour les exciser en groupe (il est à noter que l'excision des filles est aujourd'hui une pratique punie par la loi au Sénégal et est pratiquement abandonnée). Elles ne mangeaient que la sauce au gombo comme plat de résistance (sure ). Elles portent le pagne après l'excision.
Quand les garçons et les filles sont respectivement circoncis et excisées, après la prise du pantalon et du pagne par les uns et les autres, ils fêtent "leur départ de la place du village" [7] et passent les tam-tams de jamba aux garçons qui les suivent. Tous les trois ou quatre ans se met en place une nouvelle génération ; ceux qui sont entre les deux peuvent parfois être pris en tenaille ne sachant pas trop bien quel fedde intégrer.
On notera que les classes d'âge ont des fonctions importantes dans la vie sociale et culturelle du village, ce sont les catalyseurs de la reproduction sociale. Elles servent de marqueurs et de repères sociotemporels à tous villages soninkés. Par ailleurs, quand on appartient au même fedde, on peut tout se dire, un peu comme des parents à plaisanterie, sauf qu'on ne peut pas s'injurier les parents et les aînés. Les soninkés disent : "quand tu vas dans un village et que tu n'y trouves ni un parent à plaisanterie, ni une personne du même âge que toi, mieux vaut ne pas passer la nuit dans ce village".
A Bakel la circoncision a beaucoup évolué entre la période du vieux Samané et les années cinquante. L'organisation de la circoncision des jeunes du même fedde telle qu'elle nous a été racontée par Samané Sy concernait l'ensemble des quartiers de Bakel au début du siècle, alors qu'avant et après la Seconde Guerre Mondiale, elle ne concernait plus que les quartiers. Actuellement, chaque famille procède discrètement à la circoncision de ses enfants.
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