Le Baase est un acte adressé à l’endroit de l’hôte par sa famille d’accueil, mais avant le baase il y a le mukken kuuñiinde, la salutation de l’hôte qui peut être aussi symbolisée par des présents de bienvenue ; on offrait du cola dont les couleurs révélaient des significations multiples selon les circonstances. Avec l’acuité des changements économiques et climatiques dans beaucoup de situations, l’argent, le sucre, le thé et d’autres produits ont pris la place du cola, mais souvent on retient par ce geste le « kuuñiindi goro », c’est-à-dire « le cola de la salutation ». Dans d’autres circonstances, le « kuuñiindi goro » et le baase sont présentés en même temps. Quelle que soit sa position à travers le temps, essayons de voir le baase, dans sa forme mais aussi et surtout dans sa symbolique au sens du «daronde », autrement de l’honneur. Il y a une échelle de cotation dans le baase allant du gunbo (bœuf) au tanmise (ovin et caprin) en passant par des plats cuisinés ou non (lait frais, mil, etc.). Dans tous les cas, le baase se présente toujours en relation avec la nourriture. Car, dans l’idéologie des Soninkés, le mukke doit être bien nourri, mieux nourri qu’un résident habituel de la cité ; il doit l’être et le paraître ; il ne doit rien lui manquer.
Le baase se présente comme une marque de considération, de respect à l’endroit de l’hôte et de sa famille d’accueil ; il doit être précédé par le kuuñiinde. Il est tellement important dans la société soninkée que même les personnes démunies, pour ne pas perdre la face, offrent des baasu, car la déférence à l’autre est quelque part dans la symbolique du geste. En réalité, on retient plus le baase que sa nature ou sa valeur. C’est en ce sens dans que les vœux de condoléances, on souhaite systématiquement aux défunts un baase important dans l’au-delà, ce qui montre l’importance de cet acte.
Le baase ponctue l’arrivée du mukke. Pour faire court, quand le départ du mukke est annoncé, il est la cible de cadeaux que l’on appelle silahanda en soninké. Autrefois, quand le voyage se faisait à cheval, à dos d’âne ou à pied, le silahanda était essentiellement constitué de provisions (couscous, sucre…), mais depuis la monétarisation de nos économies et l’installation des rapports marchands dans nos sociétés, le silahanda est donné en argent, en tissu ou en tout autre produit. Le baase, tout comme le silahanda, a changé au gré des évolutions socioéconomiques, leurs formes et symboliques demeurant tout de même entretenues dans nos agissements, en revêtant parfois de nouveaux contours. Ces valeurs tissent l’amitié fondée sur le respect et la dignité. Le baasi, qui symbolise la réconciliation en cas de conflit, n’est-il pas le dérivé mais sûrement de la même essence que baase, ce qui fonde la fraternité entre les hommes ? Aux chercheurs de nous éclairer sur la racine et l’étymologie de ces deux taxinomies !
Moustapha Ismaila Tandia, Nouakchott, Mauritanie