Sept ans après l'adoption des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) au siège de l'ONU, la première conférence africaine sur le développement humain organisée par le Maroc à Rabat (6-7 avril dernier), en partenariat avec le PNUD, a donné l'occasion à l'Afrique de faire le bilan des résultats escomptés. Ceux-ci sont maigres. "En ce qui concerne les Objectifs du millénaire pour le développement (fixés à l'horizon 2015), nous savons bien que l'Afrique est en deçà de nos attentes. Mis à part de rares exceptions, ces objectifs risquent de ne pas être atteints", a commenté Kemal Dervis, administrateur du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).
Le continent africain demeure, en effet, la région du monde qui a enregistré les progrès les plus lents et où le nombre de démunis n'a cessé d'augmenter tout au long des années, les indicateurs étant négatifs depuis les années 80 en raison de la multiplication des difficultés économiques et sociales. Le rapport mondial du PNUD sur le développement humain de 2006 confirme la situation particulière de l'Afrique qui, contrairement aux autres continents, connaît depuis les années 1990 une stagnation, voire un recul des indicateurs de développement humain.
En Afrique subsaharienne, le nombre de personnes vivant dans une situation d'extrême pauvreté a augmenté de 217 millions en 1990 à 290 millions en 2000 dont une majorité de femmes. L'espérance de vie des adultes a même chuté, passant de plus de 50 ans à 46 ans. Sur les huit points retenus au Sommet du millénaire en 2000 pour enrayer la pauvreté, réaliser la croissance économique et le progrès social dans les pays du continent, les Etats d'Afrique traînent, pour deux tiers d'entre eux, en bas de l'échelle de classement selon l'indice de développement humain (IDH).
Le Gabon est classé au 123ème rang du fait de son IDH, malgré ses immenses potentialités (pétrole, réserves de fer, énergie hydraulique, forêt ) et son PIB par habitant qui avoisine 5.000 dollars américains, soit plus de deux fois celui de la Chine. Le pays, selon Jean Ping, vice-Premier ministre gabonais et ministre des Affaires étrangères, de la Coopération, de la Francophonie et de l'Intégration régionale, croule sous le poids de la dette et mobilise une part importante de son budget (44% en 2005) pour son règlement. Avoisinant 50% du PIB en 2005, l'encours de la dette extérieure publique est constitué de 38% de dette bilatérale due essentiellement aux créanciers membres du Club de Paris et de 11% de dette multilatérale.
Madagascar figure dans le groupe des pays à développement humain moyen. Il est classé au 143ème rang en 2004 en matière d'indicateur de développement humain. Il veut se hisser au 100ème rang en 2012. Le taux de pauvreté (pourcentage de population vivant avec moins de 2 dollars par jour) est encore élevé. Néanmoins, entre 2003 et 2005, il est passé de 85,1% à 68,7%.
Le Sénégal figure parmi les pays présentant l'IDH le plus faible. Il est 157ème sur 176. L'analphabétisme touche encore 62,2% de la population sénégalaise en 2005, soit 71,2% des femmes et 50,90% des hommes. 65,2% des individus en milieu rural et 57,5% en milieu urbain vivent en dessous du seuil de pauvreté. La République centrafricaine occupait, en 2005, le 171e rang sur 176 pays en terme d'IDH et 85e sur 94 pays en développement par rapport à l'indicateur de troubles politico-militaires. Comme l'a reconnu Antipas Mbusa Nyamuisi, ministre d'Etat chargé des Affaires étrangères et de la Coopération internationale de la République démocratique du Congo (RDC), "la mauvaise gouvernance est à l'origine de la crise actuelle en RDC. Elle n'a pas permis aux richesses du pays d'améliorer les conditions de vie de la population et a entraîné la déconfiture de l'Etat, précipitant le pays dans la guerre".
En RDC comme presque partout en Afrique, l'on observe, en dehors d'une flagrante inadéquation entre la croissance économique (souvent négative) et la forte croissance démographique, "une aggravation des manifestations de sous-développement ainsi qu'une recrudescence des épidémies, des catastrophes naturelles et des guerres civiles aux effets dévastateurs, sans parler des tensions régionales qui obèrent nos ressources - pourtant essentielles pour assurer notre développement - et qui subissent une véritable hémorragie dans des conflits éculés, lesquels sont autant d'anachronismes d'un autre âge", selon les mots de sa majesté le Roi Mohammed VI du Maroc dans son discours d'ouverture.
La crise socio-politique sans précédent qui secoue la Côte d'Ivoire depuis septembre 2002, a ainsi de lourdes conséquences aux plans social, économique et sécuritaire qui compromettent la réalisation de ces objectifs. Selon l'intervention ivoirienne à cette première conférence, 38,4% de la population vivait avec moins d'un dollar américain par jour en 2002. Ce chiffre est passé à 40% en 2005 et la situation a empiré en 2006. En ce qui concerne l'éducation, le taux net de scolarisation qui était de 56,5% en 2002 pourrait stagner, voire enregistrer un recul en raison de la perturbation du système scolaire dans la moitié Nord du pays durant ces trois dernières années.
Source : All Africa