Le sens commun veut qu’une société orale soit une société qui ne connaît pas l’écrit et " qui parle beaucoup ". La réalité est beaucoup plus complexe. Jacques CHEVRIER refuse de qualifier les sociétés orales de sociétés " sans écritures ". Pour lui, " l’oralité et l’écriture ne s’inscrivent pas dans un rapport de succession, d’évolution, ou d’exclusion, mais elles correspondent, chacune à leur place, à des modèles d’expressions spécifiques obéissant, toute idée de hiérarchie mise à part, à des conditions de production, de transmission, de conservation étroitement dépendantes d’un certain type de société. " Une société orale ne subit pas son oralité, elle en fait le choix. Cette oralité est soumise à un grand nombre de règles et remplit des fonctions sociales très importantes. Jean CAUVIN qualifie la société orale de " groupe humain qui, même s’il connaît l’écriture fonde la plus grande partie de ses échanges de messages sur la parole ". Pour lui, " une société orale a lié son être profond, sa mémoire, son savoir, ses conduites valorisées, son histoire, sa spécificité à la forme orale de communication. C’est à dire qu’il n’y a pas seulement un échange de messages dans l’instant actuel, mais il y a aussi un échange entre le passé et le présent avec ce qui fait que telle société dure à travers le temps parmi d’autres sociétés ". Cette définition nous semble très juste car elle met en avant l’idée de l’oral comme choix de vie et elle insiste sur le lien présent/passé qui est une des fonctions principales de la parole dans ces sociétés.