La question de l'immigration occupe depuis quelques années une place importante dans le débat public artistique et dans la sphère politico-intellectuelle au Mali. C'est ainsi que l'artiste Assétou Kanouté a, dans son nouvel album, décidé de rendre hommage aux Toukanrankés, et d'autre part, lancé un appel aux autorités pour qu'ils essayent de réunir les conditions favorables pour l'emploi des jeunes, afin d'essayer de réduire les risques de l'immigration et aussi permettre à la jeunesse à se ressaisir face à ce phénomène de l'immigration clandestine.
Bamako Hebdo : Cela fait un peu longtemps qu'on ne voit plus Assétou Kanouté sur scène. Que devient-elle ?
Assétou Kanouté : Tout d'abord, je profite de cette interview pour dire bonjour à tous les lecteurs et à tous mes fans. Et je remercie Bamako Hebdo qui m'offre l'occasion de m'exprimer. Assétou Kanouté est bien présente au Mali. Ce long silence est tout simplement dû au fait que je préparais mon nouvel album, qui est d'ailleurs mon troisième, baptisé ''Tounka'' c'est-à-dire aventure. Un album qui sera très bientôt sur le marché.
Mais pourquoi Tounka?
C'est à partir des constats faits sur eux à l'étranger que j'ai décidé de leur dédier un titre pour leur rendre hommage. Lors d'une de mes tournées, les aventuriers, plus particulièrement les Sonikés, m'ont rencontrée afin de m'exposer les problèmes qu'ils rencontrent en allant à l'aventure. Après moult rencontres et échanges, l'idée m'est venue de refaire un titre à travers lequel j'évoque leurs problèmes. Car, auparavant, j'avais chanté la même chanson en Bambara, mais cette fois-ci en Soninké. Aussi, à travers ce titre, je lance un appel aux autorités d'essayer de mieux organiser l'immigration avec les pays partenaires. Un phénomène qui a fait beaucoup de victimes et j'appelle les jeunes à se ressaisir face à cette situation de l'immigration clandestine. Le problème de l'immigration nous incombe tous et c'est ensemble que nous devons trouver la solution.
Concrètement, quels sont les problèmes qu'ils ont évoqués au cours de vos échanges?
Lorsque j'étais en France, les Toungharankés m'ont interpellée par rapport à de nombreuses situations. Entre autres, leurs mauvaises conditions d'hébergement, et les dangers qui jalonnent le trajet dans le désert quand on passe par le Maroc. En effet, ils m'ont fait savoir que dans ce trajet, beaucoup d'entre ont perdu la vie dans le désert. D'autres sont restés dans la mer. Ils m'ont même demandé d'essayer de faire passer les tristes images de leur parcours dans un clip. Je leur ai donné l'assurance que, prochainement, je les aiderai à véhiculer ce message afin qu'on trouve une solution réelle à ce problème.
Quel appel avez-vous à lancer aux Toungharankés?
L'appel que j'ai à lancer à leur endroit, n'est rien d'autre que d'être optimiste dans la vie. C'est vrai, ils vont à la recherche d'une meilleure condition de vie afin de venir investir au pays, mais il faut qu'ils évitent de prendre aussi des risques dangereux.
Et aux autorités ?
Quant à nos autorités, je leur demande d'essayer de réunir les conditions favorables pour l'emploi. Tout ce problème de l'immigration c'est l'emploi. Si ces jeunes avaient un emploi décent qui leur permettra d'avoir une meilleure condition de vie, ils ne prendront jamais le risque de se jeter dans cette mésaventure.
Y a-t-il d'autres sujets évoqués en dehors du problème de l'immigration que vous évoquez?
Si, j'évoque le problème de l'emploi comme je l'ai souligné auparavant. Aussi celui de l'agriculture. Vu toutes ses potentialités agricoles que nous possédons, on n'arrive pas toujours à assurer l'autosuffisance alimentaire. Il faut renforcer et consolider le développement de l'agriculture, qui constitue le fondement de l'économie nationale. Il est d'une importance particulière. Et il faut également, pour le moment, réajuster les structures de l'agriculture et de l'économie rurale et augmenter les revenus des ruraux. L'importance de l'agriculture pour l'économie est considérée ici, non seulement dans son impact direct sur l'emploi et la valeur ajoutée, mais également pour ses effets induits sur le reste de l'économie. Dans cet opus, j'évoque aussi d'autres problèmes de sociétés, telles la méchanceté, la solidarité, entre autres.
Où avez-vous réalisé cet album ?
Cet album a été réalisé au Mali, mais avec la participation de Ahmed Fofana et Assaba Draba. Mais tous les textes sont mes propres œuvres.
On a vu aussi que vous avez participé à l'album de Manjul. Comment s'est passé la collaboration?
La collaboration s'est très bien passée. Tout a commencé chez Ahmed Fofana. C'est lui qui nous a mis en contact. Ainsi, Manjul a souhaité que je chante un titre en Maninka dans son album. C'est ainsi que tout est parti. Cette collaboration a été très bénéfique et riche pour moi. Nous avons effectué de nombreuses tournées ensemble. Ça m'a permis de découvrir un autre monde, grâce à Ahmed Fofana.
Bandiougou DIABATE