Les communautés étrangères vivant en Italie et les immigrés sénégalais en particulier en veulent au «roi du mbalax», depuis quelques jours. Youssou Ndour, à travers ses déclarations en marge du plus populaire festival de musique italienne qui s’est tenu la semaine dernière dans la ville de San Remo, se dit favorable à la loi raciste votée par le Parlement italien.
«Oui aux rondes ! Il faut arrêter certains criminels !» Une opinion pro rasciste du leader-vocal du Super Etoile, Youssou Ndour irrite profondément les immigrès résidents en Italie. Le leader du «Super Etoile» de Dakar a tenu ces propos, la semaine dernière, lors d’un point de presse tenue en marge du festival de musique italienne de la ville de San Remo du 20 février dernier. Et Youssou Ndour d’y aller de ses arguments : «Je suis favorable. Se défendre n’est pas du rascime.»
Ainsi, le «roi du mbalax» aprouve la nouvelle loi italienne qui institutionnalise les rondes contre les immigrés. Ses déclarations ont eu le mérite d’occuper la Une du journal Corriere della Sera dans son édition du lendemain. Cerise sur le gâteau, tous les journaux, radios et télévisions italiennes ont fait de ces déclarations leurs choux gras. «Or, ce que Youssou ne comprend pas, d’après une source bien informée, c’est que seule une minorité se trompe d’ambition en adoptant un comportement délinquant.» Mieux, «You semble complétement ignorer la real politik italien», renseigne-t-il. Pour dire que les immigrés subissent quotidiennement des pressions psychologiques et une dangereuse hostilité du pays hôte. «Nombreux sont nos compatriotes, des pères et des mères de famille, immigrés accusés de crime et qui croupissent en prison», confie notre interlocuteur.
Que dit-il des six Africains exécutés par la camorra italienne à Villa Literno, dans le sud de l’Italie ?
Seule la défunte chanteuse sud africaine, Myriam Makéba, et quelques stars africaines et européenes avaient manifesté leur indignation et leur soutien envers les victimes. N’est-ce pas une lapalissade que de rappeler que les «rondes» de civils italiens pour la sécurité existent depuis presque 20 ans. Mais, ils n'avaient pas un cadre institutionnel. Les rondeurs presque tous des militants du Parti de l’extrême droite, Lega Lombarda, s'organisent en patrouille dans certains quartiers et parcs des villes du nord et sont prompts à alerter la Police dès qu'ils notent des «comportements d’immigrés». Il leur suffit souvent de repérer un groupe d'étrangers et surtout des arabes ou des noirs pour considérer «un comportement suspect».
Le Parlement italien a récemment adopté la proposition de loi du Lega Lombarda, parti parmi les plus xénophobes de l’Europe, appartenant à la mouvance présidentielle italienne dirigé par Silvio Berlusconi, qui légalise maintenant la ronde anti-immigrée. Ses militants affichent tous les jours à travers des médias, leur haine à l’égard des communautés magrébines et noires. Aussi, la nouvelle loi prône la séparation à l'école entre fils d'immigrès et fils d'italiens. Elle concède également aux médecins l’obligation de dénoncer et de faire arrêter par la Police tout immigré clandestin, homme, femme enceinte ou enfant malade et nécessiteux de soins. Elle interdit également l’hébergement d’un immigré sans permis de séjour même s'il s'agit de sa femme, de son frère ou de son fils. A cet effet, tout contrevenant a droit à six mois de prison ferme. Ce parti de l’extrème droite est loin de fléchir dans ses positions racistes. C’est ainsi qu’il propose une loi contre la constrution de Mosquées sur le territoire national italien. Dans beaucoup de villes italiennes, les musulmans sont interdits de prière, le vendredi. Autre proposition raciste, l’institution de wagons séparés dans les trains. Les promoteurs de cette proposition de loi qualifient les Africains de bin-bongo, c’est-à-dire de singes dans le langage du leader de la Lega.
En Italie, la société civile, les partis d'opposition, beaucoup de Cardinaux de l'Eglise catholique, les protestants se sont mobilisés contre ces lois et déclarations et contre toute attente, le leader de l’extrème droite française, Jean Marie Le Pen. Le Vatican a déclaré que ces lois tuent l’Etat de droit et le futur de l’Italie sera l’apartheid.
REPLIQUE - Mamadou Dramé, manager de Youssou Ndour : «Nous n’étions pas au courant de l’existence d’une telle loi»
«Il n’a jamais été question d’approuver quoi ce soit. Nous n’étions pas au courant de l’existence d’une telle loi. Quand nous arrivions à San Remo pour le festival, nous avions trouvés deux cas de viols perpétrés par des Africains. Il y avait des rondes effectuées par des Italiens et des Africains pour mettre la main sur les délinquants. Une démarche que nous avons salué en la considérant comme une parfaite intégration des immigrés africains en Italie. Au contraire, Youssou Ndour a fait une chanson avec des artistes italiens intitulée Opportunita qui appelle les Italiens à accepter l’autre, à considérer la diversité comme une richesse et non un obstacle. Dans les entretiens qu’il a accordés aux nombreuses chaînes de télévision, Youssou a déclaré que l’Italie n’est pas l’Eldorado, qu’il condamne l’immigration clandestine. D’ailleurs, le titre Opportunita parle de ça. Il a été bien apprécié par les Italiens. C’est un morceau révolutionnaire. Nous étions vraiment partis pour la musique. Il ne s’est jamais déclaré favorable à une quelconque loi.»
Par Birame FAYE
Source : lequotidien.sn