Comment relancer la coopération franco-vietnamienne ?
Les 7es Assises de la coopération décentralisée franco-vietnamienne viennent de rassembler à Montreuil (Seine-Saint-Denis) huit cents représentants de collectivités et d’associations sur le thème du développement durable et du codéveloppement. Elles se sont inscrites dans une vision de portée plus générale car les coopérations s’inscrivent aujourd’hui naturellement au coeur des défis de notre époque.
Du développement économique à l’aménagement des territoires, de la recherche à la formation, de la culture à l’aide sociale et humanitaire… il y a eu un élargissement des champs. Cela touche aux grands enjeux civilisationnels : la faim, la pauvreté, la santé, les rapports Nord-Sud, le sous-développement.
Les coopérations engagées par les collectivités, les associations vont plus loin que leurs propres objectifs en créant des relations entre individus et sociétés ; elles aident à comprendre et valoriser les différences, à renforcer les dialogues. Coopération et développement durable ne peuvent que se rencontrer, se féconder.
Il y a à peine vingt ans que le concept de développement durable prenait son envol à Rio de Janeiro ; il devenait immédiatement un enjeu politique. Lui donner un sens humain solidaire supposait la lutte contre les inégalités, la sauvegarde de la planète, la maîtrise par les êtres humains du développement des sociétés.
Aujourd’hui un autre concept apparaît -celui du « codéveloppement ». Ce petit préfixe « co » apporte l’idée d’avantages mutuels, de réciprocité, de respect et d’égalité. L’avantage mutuel pourrait même prendre le pas sur la mise en concurrence des salariés, des producteurs ; et la réciprocité pourrait être un élément
de régulation de la mondialisation.
Sarkozy en a saisi l’importance avec son « ministère de l’Immigration, de l’Identité nationale et du Codéveloppement ». Mais l’idée est réduite à la mise en musique de la politique « d’immigration choisie » ; elle sert d’alibi à réduire l’aide au développement en canalisant l’épargne des migrants. C’est un détournement du concept pour masquer un rejet de l’étranger.
Sarkozy et Hortefeux détruisent l’essence profonde du mot mais celui-ci n’en exprime pas moins une idée qui se cherche, qui mûrira car elle est essentielle pour demain.
Avec le Vietnam nous sommes sur un terrain propice à l’expérimentation. Le président de la Banque mondiale - M. Zoellic - vient de déclarer : « Le Vietnam a tout le potentiel pour devenir un exemple de réussite dans l’histoire du développement. » Le Vietnam est engagé dans une vision à long terme. Les besoins d’éducation, de santé, de culture, de logements croissent plus vite que la croissance elle-même et la transformation des modes de vie confronte le pays à tous les défis.
Coopération et codéveloppement peuvent se fonder sur une réciprocité d’avantages et pourraient s’appuyer sur des volontés politiques. Le Vietnam a besoin d’une politique d’équilibre entre les USA, la Chine et l’Europe ; il considère la France comme une tête de pont pour ses relations européennes, en retour, le Vietnam est une excellente porte d’entrée de la France en Asie. Au-delà des formes traditionnelles de coopération, les Assises franco-vietnamiennes ont mis en exergue deux idées.
D’abord, c’est le retour de la diaspora vietnamienne vers le « pays ». Ce retour - dans des formes diverses - se fait sur la reconnaissance des résultats, de la place acquise dans le monde. C’est un retour dans la fierté, une passerelle établie entre deux civilisations qui respectent leurs identités.
Ensuite, le « codéveloppement » prend en compte les données nouvelles des rapports Nord-Sud. Ce n’est plus seulement une opposition binaire entre les riches et les pauvres ; les problèmes, les enjeux, traversent les pays du nord comme ceux du sud d’où le fort intérêt porté par les Assises aux coopérations intercontinentales comme celles entre Montreuil (France), Diadéma (Brésil), Hai-Duong (Vietnam), Yélimané (Mali) avec le soutien de l’Organisation mondiale pour l’alimentation (FAO). Coopérer en confrontant les données asiatiques, européennes, africaines, américaines voilà une voie pour le futur.
Les terrains de la coopération avec
le Vietnam peuvent être des points d’appui pour rechercher des voies nouvelles dans une mondialisation.
Regardons donc du côté du Vietnam mais aussi de la Chine. Prenons très au sérieux l’ambition proclamée de « développement harmonieux ». N’est-ce pas - traduit en chinois - le concept du « développement durable » ?
Par Paul Fromonteil, vice-président de la région Poitou-Charentes.
Source : www.humanité.fr