Par Souaibou FOFANA: "J'ai décidé d'écrire ce texte, parce que je me suis aperçu lors de mes recherches que la famille ignore tout ou presque du parcours de ce fils, parti adolescent et qui s'est retrouvé dans une situation qui le conduira dans les tranchées françaises pendant la guerre mondiale de 1939 – 1945. Il y mourra seul, loin de sa famille."
Je remercie l'historienne Armelle Mabon, auteur entre autres de: Prisonniers de guerre "indigènes", qui m'y a poussé et fourni des documents vraiment essentiels
Il est de ces histoires-là, que l'on ne saurait rapporter sans une grosse part d'émotion.
Les évènements tragiques qui se sont produits lors de la première et de la seconde guerre mondiale ont affecté bien des familles en milieu soninké. Mais si certaines ont pu faire correctement le deuil de leurs morts et de leurs disparus, d'autres en revanche, ignorent tout du sort dont ont fait l'objet leurs fils partis en guerre et qui ne sont plus revenus. L'absence probante d'informations provenant du front ou des différents théâtres d'opérations ainsi que les cafouillages administratifs en sont les principales causes.
Parmi ces soldats africains oubliés, figure un homme: Yéli Samba Touré TIMERA. Sur certains documents le concernant, il est mentionné qu'il est né en 1917 au lieu de 1911 à Gaizu au lieu de Yaféra et pour ses proches il serait mort à Bordeaux au lieu de Lanmary en Dordogne. Toutes ces informations contradictoires, produits des documents officiels des archives françaises, ont de ce fait largement contribué au désarroi de la famille, longtemps tenue dans l'incertitude, quant à la vérité sur le sort de Yéli. Néanmoins, son histoire reste tout de même des plus extraordinaires.
Yéli Touré est né en 1911 dans le village de Yaféra, département de Bakel, au Sénégal. Issu du clan de Diabékara et de la famille de Modinkani Diabéka, il a grandi en pays soninké, dans une fratrie de 17 frères et sœurs. Il y reçut une éducation de tout ce qu'il y a de traditionnel et s'est vu inculquer des valeurs essentielles de respect, de solidarité, de dignité et de courage. Fils de Samba Touré Timéra, et de Diénéba Simbara d'origine maure, son père, homme austère et intransigeant, fut chef de village de 1910 à 1943, soient 33 ans de pouvoir.