Les industriels africains s'opposent à la conclusion des APE - La nouvelle est officielle. L'Association industrielle africaine (AIA) qui regroupe des industriels majeurs opérant en Afrique, vient de rejeter les projets d'accords de partenariat économique (APE). L'AIA qui milite pour la mise en place d'un environnement permettant un renforcement de l'industrie africaine et de sa capacité à contribuer au développement du continent, a fait part, dans une lettre en date du 24 avril 2007, de son opposition à la conclusion des APE sur les bases proposées par l'Union européenne.
M. Pierre Magne, président de l'AIA a tenu à affirmer très clairement « que les industriels africains sont totalement opposés au principe d'une ouverture réciproque des marchés entre l'UE et les différentes régions africaines. Le déséquilibre et le fossé entre partenaires sont trop grands pour susciter un accord viable ». Justifiant la position de l'AIA, il a révélé qu'en Afrique, de nombreuses industries sont à peine naissantes.
Aussi, l'ouverture préconisée des marchés condamnerait irrémédiablement l'Afrique à demeurer un comptoir d'importations. L'enjeu majeur pour l'AIA aujourd'hui, et plus que jamais, c'est l'industrialisation du continent qui est un facteur essentiel de création de richesses et d'emplois. Selon M. Magne, en l'état actuel des propositions sur les APE, l'Afrique a tout à perdre. Contrairement à ce qui se passe dans l'UE, les blocs régionaux africains ne constituent pas des marchés ouverts et les intégrations régionales en Afrique demeurent très souvent virtuelles. Ajouté à cela, les coûts des facteurs de production très élevés en Afrique (difficulté de financement, déficits infrastructurels, étroitesse des marchés nationaux, insécurité juridique, contraintes bureaucratiques, etc.).
L'AIA dénonce aussi le fait que depuis l'introduction des programmes d'Ajustement structurels en Afrique, il n'y a ni incitations à l'investissement, ni subventions. Alors qu'il n'en va pas de même dans l'UE. Face à tout cela, l'AIA rejette les propositions faites par la Commission européenne. Selon l'Association, des phases de transition de 12 à 18 ans avant l'entrée en vigueur de la réciprocité totale ne seront pas suffisantes pour combler le différentiel de compétitivité entre l'UE et l'Afrique.
De même, l'exclusion de certains secteurs sensibles conduirait à enfermer l'Afrique dans un carcan industriel économiquement et moralement inacceptable. A en croire l'AIA, tout partenariat entre l'Afrique et l'UE doit oeuvrer au développement du potentiel de l'industrie africaine à travers la mise en oeuvre d'un traitement spécial et différencié.
L'Association relève que l'histoire enseigne qu'aucune économie viable et forte ne s'est développée sans protection. Il en a été ainsi des USA, de l'Europe, du Japon ou de la Chine entre autres. Il n'en saurait être autrement pour l'Afrique aujourd'hui. «Nous invitons instamment les négociateurs à sortir de leurs salles de réunions et à aller sur le terrain pour mesurer pleinement les difficultés auxquelles font face les industriels africains. Il est urgent que les décideurs politiques africains et européens entendent la voix des industriels qui veulent prendre une part active à la définition d'un accord avec l'UE qui offre de réelles perspectives de développement à l'Afrique», a conclu M. Magne.
Jean Eric Adingra
Source : afriquenligne.fr