Une note de service de la préfecture de Nanterre décrit comment les étrangers en situation irrégulière sont invités à se rendre en personne au guichet, en réalité pour être arrêtés sur place.
Préfecture, le piège? C’est l’alerte que lancent depuis plusieurs semaines des militants associatifs, au premier rang desquels le réseau RESF, aux étrangers en situation irregulière qui voudraient se rendre en préfecture pour avoir des nouvelles de leur dossier ou demander une régularisation.
De plus en plus de sans-papiers seraient, selon les associations, « piégés » par les préfectures qui les attireraient sur place sous prétexte de « réexaminer leur dossier » pour pouvoir les interpeller à leur arrivée au guichet. Des documents de la préfecture de Nanterre (Hauts-de-Seine) obtenus par « Libération » semblent attester d’une telle pratique.
D’abord, un courrier type, adressé aux étrangers en situation irrégulière, les informe que « les demandes de régularisation ne sont plus reçue par voie postale ». Et précise : « Il vous appartient par conséquence de vous présenter le mardi ou le jeudi matin en préfecture ».
FRANCE-IMMIGRATION: Quand les préfectures piègent les sans-papiers
Dans un autre document que s’est procuré « Libération » - une note interne adressée aux agents qui accueillent les sans-papiers en préfecture - il est écrit noir sur blanc que deux catégories d’étrangers en situation irrégulière sont susceptibles d’être interpellés au guichet : ceux faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) depuis plus d’un mois, et ceux à l’encontre desquels a été pris un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière (APRF) de moins d’un an.
La note, à l’en-tête de la Direction de la Population et de la Citoyenneté, décrit par le menu le scénario conduisant à l’interpellation. Une fois que l’étranger s’est présenté « de sa propre initiative pour demander la régularisation de sa situation ou le réexamen de celle-ci », s’il appartient à l’un des deux catégories « susceptibles d’être interpellées au guichet », l’agent d’accueil est tenu de suivre le « shéma chronologique » prévu. Ce dernier se décline ainsi : « l’étranger remet son passeport à l’agent » et « prend place dans la salle d’attente ». L’agent alerte ses supérieurs, qui saisissent la direction départementale de la sécurité publique. Enfin « l’interpellation sera réalisée en cabine fermée ».
Le texte se termine par un rappel aux agents : « L’éloignement des étrangers en situation irrégulière est une mission prioritaire de notre service : nous avons dans ce domaine une obligation de résultat. Je vous demande donc d’appliquer avec un zèle particulier les instructions contenues dans la présente note ».
Depuis le 4 avril, des militants RESF mais aussi du parti communiste, de la Ligue des droits de l’Homme ou des Verts se relaient devant la préfecture de Nanterre pour distribuer des tracts et tenir une banderole « Ici on arrête, ici on expulse ». RESF a également mis en ligne une pétition pour demander à la préfecture de mettre fin à ces pratiques.
En réaction, la préfecture explique dans un communiqué, publié également le 4 avril, que « depuis début 2008, 14 étrangers en situation irrégulière ont été interpellés à la préfecture » alors qu’ils « étaient tous sous le coup de mesures d’éloignement déjà notifiées et devenues définitives ».
« Avant chaque interpellation, la personne concernée a été réentendue par un cadre du bureau des étrangers, qui a une fois encore vérifié l’absence de motifs sérieux de régularisation, précise le texte (...) Plus de 650 dossiers de personnes en situation irrégulière ont été examinés depuis le début de l’année parmi lesquels 190 ont d’ores et déjà fait l’objet d’une régularisation. »
Source: Libération.fr