Au cours d'un entretien exclusif, Souleymane Diawara s'est livré avec franchise. Le défenseur de l'OM évoque notamment le football, l'argent, sa famille et la solidarité
Souleymane Diawara, comment vous sentez-vous ?
Plutôt pas mal, même si je ne joue pas beaucoup (sourire).
Comment vivez-vous ce statut de remplaçant ?
Je ne vais pas le cacher, je le vis mal. Je suis un compétiteur et j’aime jouer. Cette situation ne me plait pas mais ce sont les choix du coach et je dois les respecter. A moi de me poser les bonnes questions et de travailler plus aux entraînements.
J’en ai discuté avec Elie (Baup) et les choses ont été claires. Il estime qu’il me manque encore quelques petites choses qui font que je ne peux pas enchaîner les matchs. Je dois tout faire pour retrouver sa confiance.
Est-ce un objectif de revenir à votre meilleur niveau après cette grave blessure à un genou ?
Ce n’est pas un défi non plus mais c’est vrai que j’ai envie de retrouver toutes mes sensations. Après une longue absence, ce n’est pas évident de revenir. Je travaille au quotidien pour revenir vite. Mais même à 34 ans, j’ai confiance en moi et je sais que je vais revenir. Quand je vois Beckham à 37 ans, je me dis que j’ai encore de belles années devant moi.
Il vous restera un an de contrat en fin de saison. Avez-vous discuté d’une prolongation ?
Pour le moment, il n’y a pas eu de discussion et aucun rendez-vous n’est programmé. Il me reste encore un an de contrat. Je me sens super bien ici au club, dans l’équipe et dans la ville. Donc pourquoi ne pas prolonger et finir ma carrière ici ?
Qu’est-ce qui vous pousse à continuer l’aventure ici malgré la mauvaise réputation de la ville et du club ?
La pression. Celle qui vous pousse à gagner, gagner et encore gagner. J’aime ça, j’aime sentir quand les supporters sont derrière toi. C’est normal qu’ils soient mécontents aussi. Il faut les comprendre : il paie pour voir du spectacle et s’ils sont déçus du résultat, ils sont obligés de gueuler. Et quand on gagne, on sait que l’ambiance va être fabuleuse. J’ai connu les deux choses mais je ne retiens que le meilleur. Je sais en tout cas qu’en France, il n’y a pas mieux comme supporters. Le football est une religion ici.
« T’as de l’argent, tu le claques »
Si vous ne prolongez pas, que pourrait être la suite ?
Il me reste encore un an de contrat, c’est encore loin. Je ne suis pas du genre à me projeter dans l’avenir. J’aurai le temps de me poser la question quand l’heure viendra.
Peut-on vous imaginer rejoindre le Qatar, la Chine et la Russie comme certains jeunes ?
Peut-être qu’il y a des offres que tu ne peux pas refuser. Il ne faut pas se voiler la face. Si on te propose un salaire de fou, tu vas y aller. Le mec qui dit qu’il préfère l’aspect sportif à l’aspect financier, il faut arrêter la comédie. Je respecte leurs décisions. Dans le football, si tu n’as pas bien investi, ce n’est pas les médailles qui vont te payer, te faire manger… Il faut penser à l’avenir. Je ne pourrai jamais critiquer un mec qui part pour ça.
Et vous, avez-vous déjà investi pour l’avenir ?
Oui, dans l’immobilier.
Quel rapport entretenez-vous avec l’argent ?
Avec ma famille, je dépense. Sans eux, je ne serai pas là. S’ils ont besoin de quoi que ce soit, je dépense sans calculer. Sinon, ça dépend. J’ai un côté économe et un côté dépensier. J’aime les fringues et puis, je ne peux pas acheter de voiture, je n’ai plus de permis (rires). J’aime les belles choses.
Est-ce que vous trouvez juste le procès que l’on fait aux footballeurs sur l’argent qu’ils dépensent ?
(Il souffle) Y’a un truc qui me fait rire. Il y en a qui parlent de voitures, de maisons de luxe mais l’argent que l’on gagne, ce n’est pas l’argent de l’Etat, c’est de l’argent privé. Et pourtant, on paie nos impôts qui vont à l’Etat. Je ne comprends pas trop parfois la logique de certains. Si tu as les moyens de t’acheter de belles voitures, pourquoi t’en priver ? Achète, va te faire plaisir. Tu vas garder l’argent et puis quoi ? Tu vas mourir avec. Tu vas être le plus riche du cimetière. T’as de l’argent, tu le « claques ». On ne l’a pas volé. On vit avec nos moyens.
Comprenez-vous que certains joueurs pètent les plombs devant tout cet argent ?
Oui, tu peux, tu n’es pas à l’abri. Du jour au lendemain, il y a plein d’argent qui arrive sur la table alors qu’avant, tu n’aurais jamais imaginé t’acheter une belle voiture sans regarder le prix. Tu peux péter les plombs. Si tu n’as pas la chance d’être bien entouré, on va te tomber dessus. Je comprends tout à fait que ça puisse arriver.
Vous souvenez-vous de la première folie que vous avez fais ?
Je me souviens qu’à l’époque, c’était des Francs. J’avais gagné 8 000 Francs et j’avais donné 3 500 à ma mère, 3 500 à mon père et j’avais gardé les 1 000 qui restaient. J’ai vu la joie dans les yeux de mes parents. J’étais fier de venir avec des sous pour mes parents. Ensuite, je me suis acheté une voiture deux-trois ans après.
« Entraîneur ? Jamais de la vie »
Qu’auriez-vous fait si vous n’aviez pas été footballeur ?
Pompier. Aller combattre le feu et sauver des vies. Pour aider mon prochain. Il n’y a pas mieux je pense.
Avez-vous déjà songé à ce que vous ferez après le football ?
J’ai des petites idées. M’occuper des associations par exemple. Et sinon, dans le football, je me vois dans un rôle de conseiller du président ou de directeur sportif. Mais entraîneur, jamais de la vie, c’est un métier plein d’embrouilles (rires).
Vous êtes le parrain d’une association, Graine de Tournesol. Pouvez-vous nous en parler ?
Quand j’ai signé à Marseille, j’ai eu la chance de rencontrer Chantal, qui est la présidente de cette association qui s’occupe d’enfants atteints de pathologies lourdes, handicapés, atteints du cancer également. Chantal m’a fait l’honneur de me demander si je voulais être le parrain de cette association et sans hésiter, c’est avec plaisir que j’ai accepté. Quand j’ai du temps libre, j’essaie d’aller les voir à l’hôpital et même si je ne suis pas médecin, j’essaie d’apporter beaucoup de bonheur aux enfants. En plus, la plupart est fan de l’OM donc ça me fait plaisir d’aller les voir. Le 13 mars, j’organise une journée de lutte contre la faim qui consistera à récolter des fonds pour les enfants qui souffrent de malnutrition.
Quand on vous entend parler, on sent que vous êtes reconnaissant de ce que la vie vous a donné…
Bien sûr, la vie m’a gâté. Et je me disais que si un jour j’avais les moyens, je ferais tout pour aider le plus de gens possible, même si je ne peux pas aider la terre entière. J’ai la chance de pouvoir aider les enfants qui souffrent de malnutrition, du cancer et de pathologies lourdes. Et il y a encore d’autres projets, j’espère aider les SDF. J’essaie de rendre ce que la vie m’a donné.
On vous sent vraiment serein. D’où cela vient-il ? L’âge, la maturité, l’amour ?
C’est un tout. Avec mes parents c’est l’amour, la rigolade, il n’y a pas de pression. Je suis vraiment bien quand je suis là-bas.
Propos recueillis en exclusivité par Karim Haddouche pour sport365