La campagne électorale s'est terminée vendre à 00H00. Il est donc plausible qu’au bout de deux semaines, ou presque, de plaidoyer en faveur de leurs programmes électoraux, les candidats auront donné aux observateurs que nous sommes -et pourquoi pas aux électeurs- tout le loisir de dégager, en toute honnêteté intellectuelle et en toute objectivité, les grandes tendances de ce que sera le premier tour.
Et l’on doit à la vérité de dire tout de suite qu’il y en a qui montent (ils ne sont pas nombreux) et qui descendent (c’est la plupart) mais et surtout que des surprises, il y en aura!
Dans un camp comme dans l’autre, une constance est restée inchangée : l’outsider Zein Ould Zeidane, dont on avait dit plus d’une fois qu’il faisait le plein à l’intérieur lors de sa tournée du 2 au 19 février 2007, continue son ascension fulgurante.
Est-il un "phénomène politique", lui qui n’avait de passé que sa gestion réussie de la BCM ou le CMAP (centre mauritanien d’analyses des politiques), donc un passé économique alors qu’il joue à présent dans une cour de grands leaders politiques dont certains n’ont pas quitté la scène depuis quinze ans ? "Phénomène politique" pour ne pas s’être entouré, ni dans son entourage direct, ni dans son directoire, ni dans ses soutiens, des ténors du système Taya, même si on lui prête, sans doute pour le casser, d’être l’arbre qui cache la forêt.
Tout cela parce qu’il a réussi sa percée politique, si rapidement, dans un environnement fort miné par une ex-opposition et une ex-majorité qui se sont mises à intégrer ou à insérer les chômeurs de l’ancien pouvoir, qu’ils soient cadres, notabilités, personnalités de poids et hommes du sérail faits ou défaits par Ould Taya. Ce qui dénote de leur incapacité de suivre le profond mouvement de liberté et la réelle aspiration des populations au changement, depuis que le coup d’Etat du 3 août en a offert l’occasion.
Tantôt s’en prenant aux hommes ayant été aux côtés de Ould Taya, dans ses gouvernements et dans son parti, le PRDS, tantôt leurs ouvrant leurs bras, les formations politiques de l’opposition traditionnelle ont été les plus surprenantes pour les populations auxquelles ce non respect de la parole et donc des principes n’échappait pas. La CFCD n’était-elle pas créée pour barrer la route aux budgétivores et au retour de ces hommes ?
Le candidat Zein Ould Zeidane sera également "un phénomène politique" parce qu’il représente aux yeux de nombre de citoyens un renouvellement de la classe politique, étant jeune (né après l’indépendance de 1960) et donc un espoir pour rompre véritablement avec le passé et ses hommes, très présents dans les deux bords de cette bipolarité que symbolisent pour l’ancienne opposition, les candidats Ahmed Ould Daddah, Mohamed Ould Maouloud et pour l’ancienne majorité, Sidi Ould Cheikh Abdallahi, bien plus que les autres.
Cela est d’autant plus vrai que Sidioca qui s’est fait entourer de tous les grands noms du système Taya, de Sghair Ould MBareck(dernier Premier Ministre) à Boullah Ould Mogueya (dernier empéreur du PRDS), en passant par Lemrabott Sidi Mahmoud, Boidiel Ould Houmeid, Cheikh Sid’Ahmed Ould Baba, et la liste est longue, n’a pas convaincu ni le public, ni le Mithaq dont on ne compte plus les déserteurs. Pourtant tous ces hommes étaient censés être des porteurs de voix en plus desquels les Indépendants devaient avoir rempli le réservoir de Sidi Ould Cheikh Abdallahi.
La réalité est toute autre, car incontestablement, le navire de Sidi Ould Cheikh Abdallahi prend de l’eau et cela, au moment où celui de Ould Daddah, qui tente sans relâche de convaincre l’Adrar et le grand Nord (Tiris Zemour et Nouadhibou) craint de plus en plus le tout nouveau Zein Ould Zeidane que les défections du rang Sidioca renforcent chaque jour davantage. Et si le vase de Sidi Ould Cheikh Abdallahi bascule chez Zein, le tour sera joué en faveur de ce jeune premier dont l’étoile est toujours montante. Il sera joué, non pas au premier tour, car l’éclatement de la classe politique avec dix-neuf candidats dont chacun est candidat parce qu’il a une famille, une tribu, une région, un groupe de parents, d’amis et d’amis des parents et de parents amis et de beaux-parents (c’est cela la Mauritanie, ne l’oublions pas !), cet éclatement-là aura des répercussions sur toute l’élection présidentielle. Aussi bien sur le taux de participation que sur les scores des candidats qui donneront deux premiers forts proches l’un de l’autre et que l’on peut déjà imaginer.
Cela, sans oublier que la neutralité de l’administration, l’indifférence et la transparence voulues et imposées par un CMJD qui sera bien là pour veiller au bon déroulement de l’élection et au respect des choix du peuple, auront des impacts directs sur ce premier tour pour ne pas dire sur cette élection présidentielle tout court.
Ce sera donc un véritable duel à mort entre les candidats et plus particulièrement entre une vieille et une nouvelle garde.
Mohamed Ould Khattat, Nouakchott Infos.