C’est contre toute attente que Mme Tambédou Bintou Diakho, issue de la famille maraboutique Soninké des Diakho de Koughany, a réussi à briser les tabous pour se retrouver au-devant de la scène politique. Et, au-delà de la loi sur la parité, sa trajectoire avait reçu la bénédiction de toute sa communauté.
« Mère Theresa » de son village Koughany, conseillère rurale de Ballou pendant trois mandats consécutifs et députée de Bakel depuis cette 12e législature, Mme Tambédou a fait un parcours politique atypique. La communauté pour laquelle elle s’est toujours battu, se retrouve en elle, parce « qu’incarnant un activisme politique respectueux des valeurs sociales, religieuses et culturelles Soninké », témoigne M. Barka Guèye, chef du village.
« Elle fera incontestablement une bonne députée et contribuera à moraliser les mœurs politiques », conclut-il. Youssouf Diakho, l’imam Ratib du village dira : « elle fait la fierté de toute la famille, du village, de la Communauté rurale et du département de Bakel ».
De sa voix juvénile et innocente de jeune femme, est convaincante. Et, subjugue son auditoire par son débit posé et rigoureux. Elle s’exprime toujours avec foi et sagesse. C’est pour cela qu’elle a « convaincu sa communauté villageoise de libérer les femmes pour conquérir et occuper de nouveaux espaces dans la vie publique, économique et sociale ». C’est lorsqu’elle a pris la tête d’un Groupement de Promotion Féminine (GPF) villageois, que la belle aventure a commencé. Pour celle qui sera rapidement identifiée comme « Mère Theresa » et dont l’œuvre marquera à jamais l’histoire politique des femmes du département de Bakel. Jamais une femme du département n’a autant œuvré dans la sensibilisation, encore moins, accédé au Parlement. Elle fait l’exception par son engagement, son courage politique et son amour pour son terroir. C’est à 25 ans qu’elle demandera à M. Abdoulaye Tambédou son époux, « l’autorisation de s’engager en politique, non pas pour y gagner quelque chose, mais pour faire gagner la communauté, car celle-ci était oubliée dans les politiques et plans de l’Etat ». Dans le but, poursuit-elle, « de signaler notre existence et faire entendre notre voix aux autorités, pour faire avancer nos villages, notre Communauté rurale, notre département et notre région ». Encouragée par son mari, elle démarre ses activités et commence par assurer une bonne animation politique dans son village, sous la bannière de la LD du Pr Abdoulaye Bathily. Sans aucun référenciel, motivée seulement par les difficiles conditions de vie des populations de son terroir.
Pour Mme Tambédou Bintou Diakho, « c’est par la politique qu’on libère les forces de développement, les femmes et jeunes qui ploient dans des souffrances indescriptibles. J’ai rappelé à l’Assemblée nationale que la région de Tambacounda a toujours été oubliée dans les politiques nationales d’éducation, de santé, de désenclavement, des femmes, d’emplois de jeunes, etc. C’est nous qui avons construit nos infrastructures éducatives et sanitaires où des Maliens et Mauritaniens viennent se soigner auprès d’un personnel que nous-mêmes payons ». « Élue conseillère rurale de Ballou, j’étais l’unique femme sur une trentaine d’hommes qui me considéraient comme une femme parmi les hommes et non une conseillère tout court comme eux ». Elle commence à travailler pour impliquer les femmes à la chose politique et communautaire. Les résultats ne se font pas attendre. « Grâce à Dieu, après la solitude qui a caractérisé mes deux précédents mandats, d’autres femmes arrivent enfin au conseil rural pour mieux organiser le front et être allégées des nombreuses charges ménagères et domestiques. Cela par des équipements en matériels domestiques », dit-elle avec un brin de satisfaction. Mme Tambédou Bintou Diakho prolonge son combat dans sa mission parlementaire, « dans la session parlementaire, au-delà de mes interventions, j’ai remis à chaque ministre les attentes des populations du département de Bakel ». Binta Sosso Diakho qui prévoit une tournée départementale imminente, appelle ses sœurs « à transcender cette considération qui consiste à croire que la politique n’est pas faite pour les femmes, qu’elle les pervertit et les rend mauvaises. Que non ! N’est mauvaise que celles qui l’étaient avant leur implication politique. D’arrêter ces applaudissements à tous vents, oubliant la rigueur de leurs conditions de vie, d’aspirer à accéder aux sphères de prise de décisions et exercer des responsabilités pour qu’elles prennent elles-mêmes leurs propres préoccupations en main ».
Mass DIACKO, Office.sn