Une tentative de coup d’Etat militaire semblait être en cours mercredi soir au Mali, menée par des soldats excédés par le manque de moyens pour combattre la rébellion touareg et les groupes armés islamistes dans le nord du pays.
La radio nationale malienne occupée par des soldats mutins a annoncé vers 23H00 (locales et GMT) à Bamako qu’un militaire allait y faire une allocution prochainement, sans en préciser l’heure.
L’Office de la radio-télévision du Mali (ORTM), qui avait interrompu ses émissions depuis son occupation dans l’après-midi par les mutins, les a reprises pour faire cette annonce et diffusait de la musique en attendant.
Cette annonce est intervenue alors que des coups de feu de plus en plus intenses entre soldats de la garde présidentielle et mutins étaient entendus autour du palais présidentiel.
« On a pris le palais », a affirmé un des mutins lors d’un bref échange téléphonique avec l’AFP, sans que cette information n’ait pou être confirmée du côté de la garde.
Des membres de la garde présidentielle, les « Bérets rouges », qui avaient pris position autour de l’ORTM occupée ont été ramenés au Palais présidentiel pour le défendre.
Avant le début des tirs, un membre de la garde avait affirmé qu’elle contrôlait la présidence et un conseiller présidentiel avait indiqué que le chef de l’Etat Amadou Toumani Touré, lui-même un ancien militaire, s’y trouvait toujours.
Des dizaines de militaires excédés par le manque de moyens pour combattre la rébellion touareg et les groupes armés islamiste dans le nord du pays se sont mutinés dans un camp à Kati, ville garnison près de Bamako.
Puis la mutinerie s’est étendue à la capitale elle-même dont les soldats ont parcouru les rues en tirant en l’air, semant la panique.
« Nous en avons marre de la situation dans le nord » du pays, en proie à une rébellion touareg et aux activités de groupes islamistes radicaux, a affirmé un des mutins.
Les soldats, qui ont investi l’ORTM, sont des jeunes. Ils ont tiré en l’air dans le siège de l’ORTM et ont fait sortir le personnel.
« Nous voulons des munitions »
« Nous voulons des munitions pour aller combattre les rebelles touareg, trop c’est trop », a déclaré un caporal du camp de Kati, d’où est partie la mutinerie.
La France, ex-puissance coloniale, a appelé « au respect de l’ordre constitutionnel » et condamné « tout recours à la violence ».
Le département d’Etat américain a pressé le Mali de régler les tensions qui divisent le pays « à travers le dialogue et non la violence ».
Début février, des femmes et proches de soldats avaient manifesté dans plusieurs villes, dont Bamako, pour dénoncer le silence sur la situation de ces soldats et la « mollesse du pouvoir » face aux rebelles touareg.
Certaines de ces manifestations avaient tourné à la violence et des propriétés appartenant à des Touareg saccagées et d’autres Maliens et étrangers à la peau claire.
Le président Touré avait réussi à calmer l’ardeur des femmes de soldats en prenant en compte leurs demandes, en particulier qu’elles puissent avoir des nouvelles de leurs maris au front.
Le Mali est confronté depuis mi-janvier à des attaques du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) et d’autres rebelles touareg, dont des hommes lourdement armés qui avaient combattu pour le régime de Mouammar Kadhafi, qui ont pris plusieurs villes du nord du pays.
Un mouvement islamiste armé touareg, Ançar Dine (Défenseur de l’islam) qui veut imposer la charia au Mali par la lutte armée, a affirmé contrôler trois villes dans le nord-est du pays, près de la frontière algérienne: Tinzawaten, Tessalit, Aguelhok.
Le gouvernement malien a en outre accusé Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), qui a des bases dans le nord du Mali d’où elle opère dans plusieurs pays du Sahel, de combattre avec le MNLA. Aqmi a été en particulier accusée d’avoir exécuté sommairement près d’une centaine de soldats maliens à Agulhok.
Le premier tour de l’élection présidentielle, à laquelle le président Touré qui a épuisé ses deux mandats de cinq ans ne se représente pas, est en théorie prévu le 29 avril au Mali, couplé à un referendum constitutionnel.
Mais des observateurs s’interrogent sur la tenue d’un tel scrutin alors que la moitié du pays est en proie à un conflit armé.
AFP