En cette période de soudure, elles jouent un rôle précieux dans le système de sécurité alimentaire
Si le marché est bien approvisionné en céréales, les prix baissent. Tout le dispositif de sécurité alimentaire élaboré et mis en oeuvre par le Commissariat chargé de la question est fondé sur cette logique commerciale. Nous sommes actuellement en pleine période de soudure. Habituellement, en ce moment de l'année, l'offre de céréales diminue sur le marché, tirant les prix vers le haut. Pour minimiser les effets de ce phénomène cyclique, le Commissariat à la sécurité alimentaire a mis sur le marché 35 000 tonnes de riz. Après la mise en vente de cette importante quantité, le Commissariat vient d'entamer la deuxième étape de sa stratégie d'approvisionnement des populations en ouvrant les banques de céréales.
C'est à Dianéguela, quartier périphérique de Bamako, que la commissaire à la sécurité alimentaire, Mme Lansry Nana Yaya Haïdara a officiellement lancé hier la campagne de vente dans les banques de céréales des 703 communes de notre pays. Dans les ruelles de ce quartier, où les eaux usées se mélangent aux eaux pluies pour offrir des abris commodes aux moustiques, la banque de céréales est gérée par la coopérative multifonctionnelle des femmes créée en mai 2005. C'est donc l'une des 20 premières banques-tests du Commissariat à la sécurité alimentaire. En fin 2005 et début 2006, des stocks de sécurité alimentaire de proximité ont été installés sur l'ensemble du territoire national. Toutes les 703 communes et quelques autres associations féminines ont été dotées de 20 tonnes de céréales.
Mme Lansry Nana Yaya Haïdara qui était accompagnée de ses collaborateurs, a expliqué aux femmes que la période de soudure exige l'ouverture de toutes les banques de céréales du pays. "C'est plus que jamais le moment de se mettre débout", a lancé la commissaire, attentivement écoutée par la vingtaine de femmes présentes. La banque de céréale est équipée d'une table métallique en guise de bureau sur laquelle sont posés une balance, une calculatrice et un registre de vente. Le stock de céréales disponible est de 9 tonnes. Le kilogramme du riz gambiaka y est vendu à 275 Fcfa ; le riz japonais est cédé à 240 Fcfa pendant que le petit mil et le sorgho coûtent 110 Fcfa, le kilogramme. Avant 11 heures hier, les gérantes avaient déjà vendu un sac de mil et un autre de riz. Une importante quantité de céréales avait été vendue au détail aux ménagères. Le commissaire a surtout appelé à la régularité des ventes et au respect des horaires d'ouverture et de fermeture du magasin pour mener à bien cette initiative du chef de l'État.
Pour Mme Samaké Néné Diakité, présidente de l'Association des banques de céréales de Bamako et de Koulikoro, la faim n'est plus qu'un triste souvenir. "Quand les banques de céréales ont commencé à vendre, des files se formaient depuis le petit matin, se souvient Mme Samaké. Ces stocks nous ont beaucoup aidé à passer les dures périodes de crise. Et maintenant, elles continuent à jouer leur rôle de sécurité alimentaire de proximité".
Ce témoignage fort éloquent a conforté le commissaire à la sécurité alimentaire de la justesse de la politique en cours. Elle n'a pas manqué de rappeler qu'une mission de suivi-évaluation est en train de sillonner toutes les communes dans le but de s'assurer du bon fonctionnement des banques de céréales.
Assurance psychologique. À ce propos, il faut noter que les premières missions d'évaluation qui ont porté sur le tiers des banques de céréales en mars dernier ont révélé des acquis importants. Les régions de Koulikoro, Sikasso, Ségou et Tombouctou ont un taux de reconstitution de plus de 72%. C'est dire que les 3/4 banques de céréales ont reconstitué leurs stocks à 100 % dans ces localités. Les régions de Kayes (65 %), Mopti (54 %), Gao (43 %) et Kidal (34 %) sont également en bonne voie. De quoi satisfaire la commissaire à la sécurité alimentaire.
Au total, 2421 tonnes de céréales sont disponibles dans les 201 banques évaluées et plus de 155 millions de Fcfa sont économisés par les comités de gestion. Cet argent doit servir à l'achat de quelques 1240 tonnes supplémentaires au terme de la campagne agricole. La mission essentielle des banques de céréales est l'amélioration de la disponibilité et de l'accessibilité des céréales pendant les périodes de pénurie notamment celle de la soudure. Le comité de gestion doit à ce titre acheter les excédents céréaliers à des prix rémunérateurs au moment des récoltes.
La décentralisation des banques de céréales a un effet d'assurance psychologique. Sans oublier qu'elle peut être un facteur de renforcement de la cohésion sociale à travers les rencontres organisées autour de la gestion du patrimoine commun.
A. M. CISSÉ
Source : L'ESSOR