Depuis plus de trois ans, l’ex dictateur sanguinaire tchadien Hussein H., exilé au Sénégal, fait l’objet des poursuites judiciaires pour les crimes connus dans son pays durant son règne. Il y a quelques mois, c’était le tour de Jean Pierre B. de répondre devant la Cour pénale internationale de La Haye pour les crimes perpétrés par ses troupes en Centre Afrique durant les années de terreur, de viol et des exactions contre les civils pendant la guerre contre le pouvoir central de la République Démocratique du Congo. Ces poursuites montrent en fait qu’aucun dictateur, aucun criminel de guerre ne doivent échapper à la justice, qu’elle soit nationale ou internationale.
Mais le cas mauritanien semble faire ici une exception. Entre 1987 et 1989 des milliers de citoyens mauritaniens ont trouvé la mort dans des circonstances cruelles et inhumaines pour des causes obscures, lâches et, à la limite, racistes. Ceux qui ont commis ces crimes contre l’humanité ne sont jamais inquiétés d’une éventuelle traduction devant les instances juridictionnelles nationales ou internationales. Or tant que les Mauritaniennes et les Mauritaniens ne régleront pas cette question, la Mauritanie de demain que nous voulons construire tardera à voir le jour.
Dans d’autres pays du monde, il y a eu des massacres plus violents et plus massifs contre des populations que ceux que nous avons connus en Mauritanie. Mais quand ceux qui les ont commis ont reconnu leurs responsabilités, quand certains d’entre eux ont été arrêtés et traduits en justice, après avoir avoué ou été dénoncés, une page de l’histoire des victimes a été tournée. En Afrique du Sud, après plusieurs années de ségrégation, d’apartheid les sud africains ont adopté une démarche juridique, Vérité et réconciliation, qui a permis aux victimes d’hier de vivre en harmonie avec leurs bourreaux. De même au Rwanda, après le génocide des Tutsis et des Hutus modérés de 1994, qui aurait fait plus de 8000000 mille morts, une Cour pénale internationale a été créée en Tanzanie ainsi que des juridictions traditionnelles, Gacaca, permettant de juger les auteurs et les exécuteurs des massacres.
Si la Mauritanie ne prend pas la résolution ferme d’en finir avec la question du passif humanitaire, il est clair qu’elle ne sortira pas de sitôt de l’auberge. Il est vrai, comme nous pouvons le remarquer aisément sur le site de Cridem, que des voix se lèvent aujourd’hui un peu partout pour souligner l’importance du règlement du passif humanitaire. Mais la parole devant être joint à l’action, des actes on ne peut plus concrets doivent être faits. Autrement dit, en termes clairs, les premiers responsables des crimes connus en Mauritanie entre 1987 et 1989 doivent être poursuivis là où ils se trouvent et traduits en justice afin qu’ils répondent de leurs crimes odieux et inhumains.
Cette question ne doit plus relever d’un tabou. On ne peut pas régler la question de la mort des milliers de mauritaniens en évitant d’aller au fond du problème. Personne, en Mauritanie, n’ignore aujourd’hui, que le premier responsable de ces crimes est Maouya. Or il est en train de mener paisiblement sa vie au Qatar. Certes des plaintes ont été déposées contre lui, mais il doit y avoir une multiplication des plaintes de sorte que finalement le présent ait raison sur le passé, que les victimes d’hier aient satisfaction, que des milliers de veuves sachent pourquoi leurs maris ont été tués…
Soumaré Zakaria Demba.