Religion : Bakel, une ancienne cité religieuse en perte d'érudits.
Au delà de ce clin œil historique de ces grands marabouts et de ces multiples péripéties, il serait légitime de se questionner sur la relève des familles maraboutiques et de l'imamat Bakélois. La relève est-elle assurée ? Comment éviter les problèmes de succession à l'avenir ? Qui doit être imam ? Quel chemin, le descendant d'un marabout doit-il suivre ?
Autant de questions qui méritent une réponse. Aujourd'hui, force est de constater que les fils de marabouts Bakélois sont plus obnubilés par la recherche de l'argent que du savoir. Et c'est normal, il faut vivre. Mais pourquoi ne pas concilier les deux comme les anciennes générations d'immigrés. Rares sont les jeunes qui se soucient de l'avenir de leur fonction. Certes, la génération intermédiaire dispose encore d'éléments convaincants pouvant présider à la direction de la la mosquée pendant deux décennies. Mais en étudiant les profils, le constat est alarmant. Avant de parler d'imamat, le rôle principal d'un fils de marabout est d'hériter son père afin de rallumer la flamme du savoir dans la maison maraboutique. Si l'on intéresse aux anciennes maisons maraboutiques citées ci-dessous, nous constaterons que plusieurs d'entre elles ne disposent plus de dignes successeurs. Si les uns ont émigré, d'autres sont simplement incompétents pour assurer la fonction. Aujourd'hui, les anciens temples du savoir anciennement dirigés par Mpaly Wane, Aladji Mamadou Sikhou Dramé, Sikhou Boye Diakhité, Mamadou Kaou Diakhité et Idrissa Kébé n'existent plus. Seuls les "xojenu" tenus par Ismaïla Dramé et les écoles coraniques de Mabo Dramé, de Samba Dramé et de Ladji Ndiobou survivent encore à Bakel. Se questionner sur la relève maraboutique de Bakel est plus que d'actualité. Plusieurs feux de camps nocturnes ont disparu. Les disciples qui venaient des pays limitrophes ne privilégient plus la piste bakéloise. Il est de plus en plus rare de voir à Bakel un Talibé ou un xaralenma de la Gambie ou du Mali. Les grands marabouts qui incarnaient la sagesse sont de plus en plus rares.
Les jeunes marabouts préfèrent les études à l'école française ou l'émigration que de cirer les tapis en cuir de peaux de moutons confectionnés lors de la Tabaski. " Moodi lenme " est devenu plus un titre qu'autre chose. Bon nombre d'entre eux ne se limitent qu'à l'étude du Coran. Les grands livres théologiques d'antan sont même invisibles dans certaines maisons maraboutiques. Depuis belle lurette, les " Walaxa " (planchette coranique) ont laissé la place aux tableaux. L'écriture en prend un coup. Avant, les élèves profitaient de l'écriture pour comprendre la différence entre différentes lettres de l'alphabet arabe. Il est de plus en plus difficile de trouver à Bakel un marabout pouvant faire une traduction du coran (Tafsir) convenablement. Aujourd'hui en France, seule la vieille génération parvint à sortir son épingle du jeu. Ils profitent des retrouvailles lors des présentations de condoléances ou de fiançailles pour partager leurs connaissances. D'ici quelques décennies, les problèmes de succession se poseront tôt ou tard. Ce n'est guère une affirmation gratuite mais une certitude. Ce n'est pas à l'heure où les carottes seront cuites qu'il faut se remettre aux études pour assurer l'aura de la famille... Comme dit le proverbe Soninké " "Seliŋen ta katoono saaxa koota "(On n'engraisse pas la poule le jour du marché). La compétence doit être la principale condition du choix d'un imam. On ne doit pas tenir compte de sa bourse, ni de l'aura de sa famille. On naît certes " Marabout " mais on doit assumer ce qualificatif durant toute sa vie. Ce n'est pas parce que l'on est fils de "Marabout" que l'on est forcément un érudit. Le savoir doit être entretenu comme l'on entretient son corps. On ne doit pas clamer sa qualité de marabout sur tous les toits, il faut le vivre. Si demain, les familles maraboutiques n'ont pas de relève, il est religieusement recommandé de donner les clefs de la mosquée aux personnes plus instruites et plus sages. Et cela sans considération sociale. Un homme averti en vaut deux. Les fils de marabouts doivent prévenir avant de guérir parce qu'encore une fois de plus, le proverbe soninké nous dit que : "Seliŋen ta katoono saaxa koota "(On n'engraisse pas la poule le jour du marché) dit un proverbe Soninké.
Samba Fodé KOITA dit EYO pour www.bakelinfo.com
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