Jeune, chanteur mandingue, Djiby Dramé est l’une des révélations de la musique sénégalaise cette année. Né à Tambacounda en 1978, il se distingue sur scène surtout avec ses jolis basins teints et bien amidonnés. Un choix vestimentaire que l’artiste justifie bien.
Son nom se confond aujourd’hui avec les grands boubous teints et bien amidonnés. Sur scène, lors des mariages et baptêmes, Djiby Dramé attire le plus l’attention des fans avec ces jolis boubous en vogue au Sénégal. Le choix de ce style a été mûri, à l’en croire. “ Les basins font partie de notre patrimoine culturel. Ce sont des produits conçus et réalisés par notre expertise. C’est notre savoir faire ”. Il ajoute : “ j’ai choisi de bien m’habiller, mais en portant des boubous issus de mon milieu. Les mandingues aiment les basins. Mes parents s’habillent très bien. Je suis obligé de suivre leurs traces. Parce que c’est cela qui fait notre différence ”.
C’est pourquoi notre interlocuteur dit éprouver une certaine fierté quand les gens l’interpellent pour apprécier son choix vestimentaire. “ Je défends une des valeurs culturelles mandingues ”, souligne-t-il. C’est dans ce sillage que s’inscrit “ la nuit des basins ” qu’il organise tous les ans à Dakar. “ La nuit des basins se tient après la fête de la Korité. Les gens viennent en arborant, les basins qu’ils ont achetés. C’est un fort moment de communion ”, selon lui.
Djiby Dramé a gagné sa notoriété au Sénégal à travers ces nuits du basin.“ Je l’aime à cause de ces jolis basins. On voit toutes sortes de basin pendant la nuit du basin. Et cela me fait énormément plaisir ”, témoigne une dame, trouvée dans les jardins de la maison de la culture Douta Seck où l’artiste était récemment attendu pour un spectacle.
Né en 1978 à Tambacounda, Djiby Dramé est d’une famille griotte. Une situation sociale qu’il raconte avec une très grande fierté. “ j’ai hérité ce que je suis aujourd’hui. Je suis de la grande famille des griots. Mon père est sarakholé, ma mère bambara ”, fait-il savoir. Le natif du Sénégal oriental a commencé à chanter tout jeune. Il a dû même abandonner l’école au Cm2, en 1992. “ J’étais membre de la troupe théâtrale de notre école. Mes parents se sont vite rendus compte que je ne voulais pas réussir dans les études ”, confie-t-il.
Le divorce avec l’école lui ouvre les portes de la capitale, Dakar. Il intègre l’école des arts et signe un contrat avec le Théâtre national Daniel Sorano où son père, Dembo Dramé, un grand artiste, a laissé des traces avant de s’envoler pour Paris.
Le contrat signé avec le temple de la culture sénégalaise marque le début du combat “ pour imposer le folklore mandingue dans le champ musical sénégalais ”. “ Les sonorités mandingues étaient très marginalisées. Nous n’étions pas présents dans les grands rendez-vous ”, se souvient-il. Pourtant, ajoute Djyby Dramé, les mandingues ont un riche patrimoine culturel qui peut être apprécié par toutes les sensibilités. Pour preuve, dit-il, “ j’ai des milliers de fans à Tambacounda où il y a un brassage ethnique très fort. Les mandingues, bassaris, serères et autres aiment bien ce que je fais ”.
Pour faire face à la “ marginalisation ”, il dit avoir investi le créneau des baptêmes et mariages. “ Pendant des années, mon domaine de prédilection était les mariages et les baptêmes, à part bien sûr la nuit du basin. Les nobles, surtout ceux de la communauté mandingue, m’invitaient et je faisais leurs louanges ”, explique-t-il.
Sa nouvelle production intitulé “ Dello dioucal ” se porte bien sur le marché. Le clip est très bien apprécié, selon lui. Mais, l’enfant de Tambacounda souhaite faire bien. “ Je peux faire beaucoup de choses avec le folklore mandingue ”, affirme-t-il.
Cependant, comme bon nombre d’artistes, Djiby Dramé souffre de la montée en puissance de la piraterie. Un phénomène accentué, selon lui, par les mélomanes qui achètent les cassettes des pirates. “ Si les mélomanes s’abstenaient d’acheter des cassettes piratées, les marchands cesseraient de les vendre ”, déclare-t-il. Djiby Dramé estime également que l’Etat devrait traquer les pirates qui, selon lui, sont un peu partout à Dakar et dans les régions. “ Il faut aider les artistes à vivre de leur art. Sans art, il n’y a point de développement. C’est difficile de travailler pendant des années pour sortir une cassette et voir ce produit circuler entre les mains des pirates. C’est injuste et décourageant ”, dénonce-t-il.
BABACAR DIONE, LE SOLEIL
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