Le nouveau président élu de Mauritanie Sidi Ould Cheikh Abdallahi doit prêter serment jeudi à Nouakchott, en présence de plusieurs chefs d’Etat africains, marquant la fin d’un processus exemplaire de passage du pouvoir des militaires aux civils après un coup d’Etat en 2005.
NOUAKCHOTT – Sidi Ould Cheikh Abdallahi, premier chef d’Etat démocratiquement élu d’un pays où depuis l’indépendance en 1960 les présidents étaient jusque-là arrivés au pouvoir par des coups d’Etat, se faisant ensuite reconduire lors de scrutins entachés de fraudes, sera confronté à des défis de taille. Âgé de 69 ans, le président, qui aime à se présenter comme un homme de consensus, "ne chômera pas, plusieurs chantiers doivent s’ouvrir" et celui visant à "raffermir l’unité nationale et bâtir un Etat de droit ne sera pas le moindre", a indiqué à l’AFP le politologue Daha Ould Teiss.
Sidi Ould Cheikh Abdallahi livrera les grandes lignes de sa politique lors de son discours d’investiture, selon ses proches collaborateurs. Au moins six chefs d’Etat de la région dont ses pairs du Sénégal et du Mali, le numéro deux de la diplomatie américaine, John Negroponte, ainsi que des représentants du Maghreb, de France et d’autres pays du monde assisteront à la cérémonie. Les Etats-Unis ont été parmi les premiers pays à féliciter le nouveau président, élu au second tour le 25 mars, avec plus de 53 % des voix. La Mauritanie est un des alliés de Washington dans la lutte contre le terrorisme.
Le nouveau chef de l’Etat, ancien ministre, rentré au pays en 2003 après 14 ans passé au Niger comme conseiller économique, se donne comme priorité de bâtir un Etat de droit et promet de renforcer l’unité nationale de son pays exposé à des problèmes ethniques et socio-économiques. Il promet notamment la réhabilitation dans leurs droits de centaines de Négro-Mauritaniens (minorité vivant dans le sud du pays) qui ont souffert d’exactions et dont plusieurs milliers ont été expulsés vers le Sénégal et le Mali entre 1989 et 1991. Avant sa victoire, il s’était engagé à "régler le problème des réfugiés en un an, voire six mois".
Il doit aussi s’attaquer au problème de l’esclavage, officiellement aboli en 1981. Les cas qui subsistent encore "seront sévèrement punis" et "une législation spéciale criminalisant l’esclavage" sera adoptée, a-t-il promis.
Les anciens esclaves, frappés de plein fouet par l’extrême pauvreté, bénéficieront, selon lui, d’une "politique de discrimination positive, prévoyant des programmes économiques ciblés". La lutte contre la pauvreté et l’amélioration du niveau de vie des 3,1 millions d’habitants, sans renier l’option libérale qui constitue le point focal de son programme économique, constitueront un autre défi majeur auquel le nouveau président doit s’attaquer dans l’immédiat.
Pour cela, il a réussi à mobiliser autour de lui une partie des opposants au président déchu, Maaouiya Ould Taya, dont un des plus virulents, M. Ould Boulkheir et son principal challenger, Ahmed Ould Daddah, lui tend également la main. "C’est un défi politique énorme, le pays est divisé en deux blocs et il faut les associer pour qu’ensemble, les Mauritaniens puissent relever les défis auxquels ils ont à faire face", a estimé mardi, l’avocat Mohameden Ould Icheddou lors d’un débat radiodiffusé sur cette question.
Quant au président sortant et chef de la junte ayant effectué le coup d’Etat militaire d’août 2005, le colonel Mohamed Ould Vall, il doit faire valoir ses droits à la retraite et a, jusqu’à présent, refusé de dévoiler ses projets pour l’avenir.
Source: AFP