A Bakel, les avis sont partagés sur la grève de l'Intersyndicale enseignante. Si d'aucuns la trouvent justifiée, d'autres la considèrent comme une prise d'otage qui ne dit pas son nom.
Comme prévu, les enseignants de la circonscription scolaire de Bakel, à l'image de leurs collègues des autres localités du pays, ont encore boudé les salles de classe. Jetant du coup leurs élèves dans la rue. Et cela, pendant trois jours. C'est-à-dire jusqu'au vendredi 30 mars. Cette attitude des enseignants de Bakel comme partout ailleurs fait suite au mot d'ordre de grève de 72 heures décrété par leurs syndicats respectifs regroupés au sein d'une intersyndicale. Ce mouvement d'humeur, du moins à en croire les échos qui nous sont parvenus, est suivi à la lettre par presque l'ensemble des enseignants concernés au niveau de la commune et du département de Bakel. Ici, nombreux sont les établissements scolaires qui demeurent fermés, faute d'enseignants. Par contre, au niveau du lycée Waoundé Ndiaye de Bakel comme dans nombre de collèges d'enseignement moyen (Cem), la situation est tout autre.
En effet, à ce niveau, peu d'enseignants ont observé le mot d'ordre. Parce que, au niveau de Bakel, les avis sont partagés sur ce mouvement. En effet, si certains n'ont pas manqué de fustiger la grève, d'autres, par contre, émettent un avis favorable. Beaucoup de personnes rencontrées, notamment des parents d'élèves, accusent les enseignants de vouloir hypothéquer, voire sacrifier l'avenir de leurs enfants. 'Les enseignants demandent trop. Ils ne sont jamais satisfaits. D'ailleurs ils ne vont en grève que pour réclamer de l'argent', laissent entendre certaines personnes rencontrées. Toutefois, reconnaissent certains, les enseignants ont quand même du mérite. Seulement, plaide-t-on, il faudrait qu'ils changent de forme de lutte. En effet, font-ils remarquer 'avec le régime de Wade, beaucoup d'efforts ont été consentis dans le secteur de l'éducation'.
Abdoulaye Bâ, un parent d'élève que nous avons rencontré, rame plutôt à contre-courant de cet avis. M. Bâ pense que les enseignants n'ont aucun intérêt à prendre leurs élèves en otages. Pour lui, c'est plutôt le gouvernement qui prend et les enfants et les enseignants en otages. Ce ne sont que des 'rhétoriques politiques', lance-t-il. Notre interlocuteur plaide pour une plus grande concertation entre enseignants et autorités.
Coordonnateur de la table départementale de concertation de l'éducation de Bakel, Mamadou Diouf, par ailleurs chef du service départemental du développement communautaire et enseignant de formation pense que, comme tout corps de métier, les enseignants ont le droit de revendiquer de meilleures conditions de travail et de vie. Pour ce faire, dit-il, ils ont le droit d'aller en grève d'autant que cette forme de lutte est inscrite dans la Constitution. Mais également parce que leur préavis a, depuis longtemps, été déposé. Il plaide pour qu'enseignants et gouvernement reviennent à de meilleurs sentiments et acceptent de s'asseoir autour d'une même table pour trouver une solution heureuse à ce problème.
Il reconnaît que le gouvernement a quand même fait des efforts et qu'il faudrait tendre vers un syndicalisme de contribution et bannir le jusqu'au-boutisme pour sauver l'école sénégalaise. Le coordonnateur de la table de concertation de l'éducation de Bakel lance un appel aux enseignants à se ressaisir. S'il reconnaît qu'ils ont, certes, le droit d'aller en grève, il n'en pense pas moins que les élèves ne doivent pas être sacrifiés. D'autant que les enseignants sont, confie-t-il, avant tout, des éducateurs. Mamadou Diouf pense, cependant, que c'est trop dire que de considérer que les enseignants prennent les élèves en otages. Pour lui, les enseignants ne font qu'exercer ce que leur permet la loi pour se faire entendre des pouvoirs publics.
Elh. Thiendella Fall, WalFadjri