La visite tant attendue du Président sénégalais aux nouvelles autorités guinéennes s’est déroulée en deux tours d’horloge. Le temps que Me Wade leur réaffirme son soutien et celui de la France avec, au détour, une bravade nette à l’encontre de ses pairs de la Cedeao.
Deux heures d’horloge, de 19 à 21 heures, c’est le temps de charge que le Président Abdoulaye Wade aura passé à Conakry, mercredi dernier. Deux heures d’entretien en tête à tête avec le capitaine Moussa Dadis Camara et le Premier ministre Kabinet Komara qui lui ont permis de réaffirmer son soutien à la junte guinéenne parvenue au pouvoir après le décès de Lansana Conté. Cet appui qui se veut critique au vu des perspectives politiques envisagées, notamment, la remise du pouvoir aux civils à brève échéance, s’écarte des positions de principe défendues par l’Union africaine, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest et les Etats-Unis, demandant tous, un retour immédiat à l’ordre constitutionnel.
Selon des informations de sources diplomatiques recueillies dans l’après-midi d’hier, c’est justement contre cet «ordre constitutionnel» que le Président Wade s’est élevé en confiant qu’il ne voit pas pourquoi Aboubacar Somparé (Ndlr : président de l’Assemblée nationale et présumé dauphin constitutionnel de Conté) serait plus habilité que Moussa Dadis Camara à assurer la transition politique en Guinée. Une manière comme une autre de considérer la Constitution guinéenne comme un instrument inopérant et inadapté aux exigences de la situation provoquée par la brusque vacance du pouvoir.
Selon la radio dakaroise Convergences Fm, Me Wade a dit sa conviction qu’il n’y a point eu de coup d’Etat militaire car, le pouvoir était effectivement dans la rue aussitôt annoncé la mort du Président Lansana Conté.
Néanmoins, le numéro un sénégalais, qui a également rapporté aux autorités de Conakry le soutien de la France après le passage d’Alain Joyandet, a exhorté la junte à conduire une bonne transition démocratique et à s’en tenir aux promesses fermes données à une communauté internationale décidée à lui mettre des bâtons dans les roues.
Profitant de son passage à Conakry, Me Abdoulaye Wade a pour la première fois réagi à l’intention annoncée de la Cedeao, de condamner ses soutiens répétés aux régimes militaires naissants en Afrique. Selon nos informations, il a indiqué que les «gesticulations» de ses pairs communautaires ne l’émeuvent point. Promu «star» du Sommet qui s’ouvre aujourd’hui à Abuja, le Président sénégalais, à moins d’une décision de dernière minute, ne sera pas présent dans la capitale nigériane (où se tient aujourd’hui la réunion des ministres des Affaires étrangères et le sommet des chefs d’Etat, ce samedi). Une absence qui lui permettrait d’éviter un procès par ses pairs, et donc, l’humiliation, car ce serait un précédent incontestable en Afrique. De toutes les façons, la Guinée est bien partie pour être suspendue de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest.
La presse locale qui attendait beaucoup de ces entretiens de Me Wade avec le nouvel exécutif guinéen est repartie déçue de l’opacité organisée pour la circonstance. Moins ou plus que la colonie sénégalaise à qui une audience, finalement annulée, avait été promise avec son président.
Source: Le Quotidien