En cette fin du XXe siècle, l’Afrique est en proie à un processus de changement socio-économique rapide. Au plan économique, l’application de réformes à travers les programmes d’ajustement structurel se généralise, conséquence de l’échec des options et des stratégies en matière de développement socio-économique héritées de la colonisation. L’élan d’enthousiasme suscité, à l’aube des indépendances, par la planification du développement socio-économique a laissé place à la désillusion. Dans l’ensemble, le bilan économique est désastreux. Selon Amin (1990 :13), la croissance du PIB par être pour l’ensemble des économies africaines n’a été que de 1,3 % par an au cours de la décennie 1960, de 0,8 % pendant la décennie suivante. Elle descendra à moins de 0,8 % dans les cinq premières années de 1980. Ainsi, non seulement la croissance, tant espérée, du produit national a été limitée, mais sa répartition n’a privilégié que quelques couches au détriment de la majorité de la population.
Le projet de loi sur l'immigration est fondé sur l'inhospitalité
Marie Rose Moro, ethnopsychiatre, dirige le service de psychopathologie de l’enfant et de l’adolescent à l’hôpital Avicenne de Bobigny (Seine-Saint-Denis). Elle explique comment l’idéologie actuelle pousse les migrants à s’acculturer au prix d’une désintégration.
Comment le projet de loi sur l’immigration de Nicolas Sarkozy est-il perçu à la consultation transculturelle que vous avez créée à l’hôpital Avicenne ?
J’évoquerais uniquement ce que l’on observe à l’hôpital. Les patients sont inquiets, ont le sentiment que la question des soins est compromise, que l’hôpital n’est plus un lieu sûr. Des rendez-vous sont annulés par des personnes qui se sentent menacées. Une angoisse monte, même chez les migrants qui ne sont pas concernés par ce projet de loi parce qu’ils ont déjà des papiers, un travail, un logement. On observe une radicalisation de toutes les positions. Lorsqu’on se sent menacé dans son identité, on se recroqueville. Personne ne peut s’intégrer dans une société inhospitalière. Or ce projet de loi est fondé sur l’inhospitalité. L’autre est perçu comme un danger a priori, et il doit immédiatement, et comme par magie, abraser toutes ses différences. On exige qu’il donne des gages de son amour pour la France, qu’il parvienne, avant même d’y vivre, à en maîtriser la langue ! On sait bien que l’accueil des migrants pose des questions juridiques et économiques, mais aussi symboliques et imaginaires. Les étrangers ne s’intègrent plus, déplore-t-on. Je crois surtout qu’on ne se donne plus les moyens d’intégrer les migrants et leurs enfants par crainte d’être soi-même transformé. Car l’hospitalité est toujours un partage, comme en témoigne le double sens du terme d’hôte. Or, aujourd’hui, toutes les conditions sont réunies pour qu’il n’existe ni rencontre ni échange ni métissage.
La construction de l'identité chez les adolescents issus de l'immigration africaine
La construction de l'identité chez les adolescents issus de l'immigration africaine.
Migrations et Société, Vol. VIII, n°44, Mars-Avril , 1996.
Les études sur les adolescents immigrés ont souvent interprété leurs difficultés en termes de perte de repères culturels ou de démission parentale . Au moment où le débat sur l'intégration s'oriente sur les problèmes de perception sociale ( Tribalat 1995), cet article se propose d'examiner quelle est la part prise par la dimension raciale dans la construction de l'identité des adolescents africains ? quelles sont les interactions entre l'adolescent africain et le milieu dans lequel il construit son identité ? Quelles leçons peut -on tirer de la connaissance de la conception de l'adolescence en Afrique noire pour aider les parents migrants et les travailleurs sociaux à mieux répondre à la demande des adolescents issus de l'immigration africaine ?
L'histoire de l'immigration aujourd'hui. Quelques pistes de réflexions
L'histoire de l'immigration aujourd'hui. Quelques pistes de réflexion
J'ai rappelé dans un premier temps quel était mon point d'observation : celui des recherches que j'ai conduites depuis 1988 sur l'histoire des Italiens en région parisienne et dont est issue une thèse qui vient d'être publiée [1] . Ce travail a porté sur une durée longue (des années 1880 aux années 1960) et s'est attaché à comprendre les processus d'intégration à travers le cas de deux quartiers de l'Est parisien et de deux communes de banlieue proche. A l'instar de ce qu'avait fait Gérard Noiriel pour Longwy, la recherche s'est attachée à séparer le moins possible, dans le cadre parisien, les immigrés de l'environnement social autochtone. Autre impératif de méthode, les changements d'échelle (agglomération, nation, relations internationales) étaient considérés comme indispensables aux mises en contexte qu'impose l'analyse historique.
Le foyer Bara, un village pour les Maliens de Montreuil
Le foyer Bara, un village pour les Maliens de Montreuil.
Aussi connu à Bamako que la tour Eiffel, il reproduit les structures traditionnelles du pays
Ailleurs en France, la lettre aurait sans doute amusé. On se la serait passée de main en main, de service en service. Le soir, l'anecdote aurait fait rire les enfants. Ailleurs, peut-être.., Ici, le postier a rapidement lu l'adresse: "Dembele Moussa, Montreuil, France ". Il a retourné l'enveloppe pour vérifier que les détails manquants ne figuraient pas au dos, entre un numéro de téléphone et un salut amical. Puis il a placé la missive avec les autres, les centaines d'autres qui arrivent chaque jour au foyer de travailleurs maliens de la rue Bara, à Montreuil (Seine-Saint-Denis). Sans hésiter. Comme une évidence.
Le foyer Bara. Une ancienne usine de pianos transformée, il y a trente ans, en centre d'hébergement de travailleurs africains. Des murs extérieurs dignes d'un château fort et quatre étages de fenêtres encombrées de serviettes de toilette. De l'immeuble jaune et brun s'échappent quelques sonorités exotiques. Derrière le porche, constamment ouvert, on devine une certaine agitation. Mais on est loin de ce "petit Bamako" annoncé par le cafetier voisin. Loin aussi de soupçonner qu'ici commence un monde à part, véritable lieu de légende, dont la notoriété au Mali est comparable à celle de la tour Eiffel ou de l'Arc de triomphe.