Prévu pour le mois d’octobre prochain, le retour des réfugiés installés le long de la vallée du fleuve pourrait bien ne pas avoir lieu à la date indiquée. En effet au moment où les nouvelles autorités engagent une course contre la montre, des voix se sont élevées pour polémiquer autour de ce rapatriement. Car, pour certains, non seulement le recensement fait jusqu’ici est loin de la réalité, mais il urge aussi, du côté des autorités, de leur garantir avant tout, la sécurité une fois de retour au bercail.
(Correspondance à Nouakchott) - Depuis quelques mois, il ne se passe pas un jour sans que le retour des réfugiés ne fasse l’objet de discussions, dans tous les coins et recoins des rues de Nouakchott. Au niveau des autorités aussi, il ne se passe jamais de semaine sans que le comité interministériel chargé du retour de ces réfugiés ne se réunisse pour faire le bilan d’étape du travail accompli jusqu’ici avec les responsables de ces réfugiés que sont la société civile, les Ong, ainsi qu’avec les acteurs politiques et les responsables du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (Hcr).
Cependant à voir de très près, c’est une véritable course contre la montre qu’ont engagée les autorités pour régler ce dossier vieux de dix-huit ans. .Mais aujourd’hui, si les hommes au pouvoir sont décidés à organiser le retour de ces déportés, basés, pour la plupart, au Sénégal au Mali, il est clair que les concernés pourraient buter sur plusieurs obstacles. Car, sur le terrain, la polémique a fini de s’installer sur ce rapatriement. .En effet, plusieurs Ong nourrissent déjà la crainte de voir des personnes qui n’ont rien à voir avec ce dossier l’infiltrer. Des personnes installées au Sénégal qui avaient du mal à travailler en Mauritanie pourront profiter de cette aubaine pour en fin pouvoir bénéficier d’une carte de séjour dûment établie par l’Etat mauritanien. Autre source d’inquiétude : le laxisme qui entoure la délivrance de documents. En effet, nombre de personnes ne cessent de se faire enregistrer comme étant des réfugiés sur simple déclaration. Sans, en retour, qu’on leur exige une quelconque pièce d’identification.
Cependant du côté de certaines familles de réfugiés issues des villages de Mbagne, Kaédi, Bababé, Louboyra, et Sorimalé- dont certains membres de familles sont déjà de retour à Nouakchott- l’installation est presque effective en plein cœur de la capitale : vers Sococim, Ksar, Sixième ou à la Médina. Ces familles soulignent qu’au-delà de leur retour, le plus important reste leur sécurité. Car pour eux, rien ne sert de les faire revenir s’ils doivent affronter les mêmes difficultés. C’est pourquoi, disent-ils, au-delà de leur retour et du règlement du passif humanitaire, ils veulent connaître les mesures prises pour leur sécurité avant de traverser le fleuve. .Et selon nombre d’entre eux, tout est aujourd’hui flou. Ce qui ne devrait pas être le cas en ce moment. ‘J’ai beaucoup envie de revenir, je suis juste de passage à Nouakchott pour des soins. Je souhaiterais, en cas de retour, bénéficier de la sécurité pour mes enfants et pour moi-même. Et je vous jure, c’est ce même sentiment qui anime mes autres parents restés au village ’, déclare Fatimétou Bâ, une dame rencontrée dans la capitale. Un sentiment partagé par Mohamadou Lamine qui soutient être revenu et avoir déjà repris son travail dans une entreprise de la place. Mais il dit préférer laisser sa famille au Sénégal pour le moment. ‘ Tant que je n’aurai pas la certitude que toutes les garanties sécuritaires sont prises pour le retour de ma famille et pour tant d’autres, je ne ramènerai jamais ma famille ici ’, a-t-il laissé entendre.
Précisant aller souvent voir sa famille.
.Aujourd’hui pour certains responsables, il est obligatoire que les autorités se réfèrent uniquement au Hcr pour identifier les vrais réfugiés. Car ces responsables disent ne pas comprendre que les procédures d’enregistrement se fassent dans certains bureaux de Nouakchott. Parce que, ce qui inquiète le plus ces réfugiés, c’est l’ouverture à Nouakchott de bureaux qui font office d’enregistreurs d’anciens réfugiés rentrés au pays depuis longtemps.
Si certains privilégient leur sécurité, d’autres jugent important que le nombre exact de réfugiés soit connu. Car, ils estiment que sans un recensement digne de ce nom, l’opération peut ne pas profiter aux ayants-droits.
Mais à côté de toutes ces inquiétudes formulées, de part et d’autre, il reste cependant à voir si le retour de ces réfugiés programmé en fin octobre sera effectif. Parce que, force est de reconnaître que beaucoup de zones d’ombres restent à éclaircir. C’est le cas de l’indemnisation des réfugiés. Sur quelle base pourrait-on reconnaître les bénéficiaires ? Combien seront-ils ? Vont-ils bénéficier de simples dédommagements ou reprendront-ils leurs biens tels qu’ils les avaient laissés à leur départ ? De quelles garanties sécuritaires pourront-ils bénéficier de le part de l’Etat ? Autant de questions qui restent encore sans réponse.
Abou KANE
Source : Walf