- Les fracassantes révélations de la mère de la victime
- L’enquête de la gendarmerie bat de l’aile, malgré les pistes avancées
- Les projets de la victime hypothéqués
Jeudi 4 décembre dernier, les populations de Kouthia Couroumba dans la communauté rurale de Sinthiou Maléme, située à 13 kilomètres de Tambacounda faisaient une macabre découverte : le corps sans vie de leur fils, Sally Sakho, âgé de 30 ans, émigré, basé en France, revenu au bercail pour des vacances, trouvé mort non loin de leur village vers les coups de 18 heures. Sally Sakho a été abattu de plein fouet par des bandits armés de fusils à bord d’une moto en compagnie de son ami mécanicien, Doro Kanté. Séjournant dans son village depuis Octobre dernier, Sally venait juste de célébrer la venue de son épouse Goundo Aïdara qu’il a épousée en 2004. Aujourd’hui c’est tout un village et ses environs qui pleurent leur fils, frère et ami, parti à jamais, laissant derrière une veuve, des projets parmi ceux-ci, un appartement en construction dans sa grande maison familiale. Sa maman, effondrée par la mort tragique de son fils, s’en remet à Dieu, et interpelle même le président de la République pour que justice soit faite dans cette affaire. Selon la dame Bouthiné Sakho, les assassins de son fils habitent Tambacounda.
Samedi 13 Décembre, le soleil des grands jours se pointe. Il est onze heures passé de trente cinq minutes, quand nous quittions le garage de Kothiary à bord d’un taxi pour rallier le village de Kouthia Couroumba. Deux voies nous sont indiquées par le taximan pour rallier le village. La première, est un raccourci distant du village de 9 kilomètres, et qui passe derrière la direction du parc national de Niokolokoba. C’est cette piste sablonneuse, faite de latérite rouge qu’avaient empruntés, l’émigré, Sally Sakho et son mécanicien, Doro Kanté, avant d’être tués. La deuxième s’ouvre sur la Nationale 7 qui mène vers Bakel. Une voie que nous avions empruntée pour plus de sécurité. Pour rallier le village, il faut dépasser le gros village du nom de Botou, face à un tableau indicateur sur la gauche, au bord de cette route nationale numéro 7 d’où est mentionné Kouthia Couroumba à 5 Km. Notre brave taximan bifurque à gauche sur une piste sablonneuse. Pressé d’y accéder, nous n’hésiterions pas à chaque instant qu’on aperçoit un village, à demander le taximan, si nous sommes arrivés? Dans cette bourgade de plus 1000 âmes, composée pour la majeure partie de Soninké, le calme plat régnait quand nous franchissions l’entrée du village dont un terrain de football et quelques maisons étaient visibles. Nous finirons par garer sous un arbre à palabre où, à côté, quelques vieux avaient fini de s’étaler sous un hangar fait de branchages. Nos salamalecs d’usage trouvent réponse dans le dialecte de cette localité qu’est le soninké ; avant que nous soyons conduits dans le domicile des parents du défunt émigré parti à la fleur de l’âge, de triste manière. Dans la grande maison de la famille Sakho, un groupuscule de femmes, avait pris place sous un hangar, entouré du maître des lieux, Issa Sakho, père de la victime. C’est un calme plat, des visages crispés, accompagné de mines tristes, qui nous a accueillis, lors de notre arrivée pour recueillir leur sentiment face au drame qui les frappe. Dans la famille, ceux qui ont connu et côtoyé, cet homme est une âme sensible et charitable. Notre premier interlocuteur fut son papa, un ancien émigré qui a quitté son village en 1965 pour aller chercher fortune à l’étranger. Cultivateur de profession, Issa Sakho, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est né en 1935 à Kouthia Couroumba. « Mon fils Sally était l’espoir de ma famille. Très courageux et ambitieux, je l’ai fait venir en France en 1999. Il était à mes côtés, et s’occupait bien de son travail, malgré le fait qu’il n’avait pas de papiers réguliers pour mener tranquillement à ses occupations. En 2001, je suis rentré définitivement au bercail, le laissant seul en Europe », déclare le responsable de famille, qui continue de pleurer son fils aîné, parti très tôt. Avant de poursuivre que, « c’était un garçon très ambitieux avant sa mort, il venait de boucler ses dix années en France. C’est quand il a eu ses papiers qu’il est venu uniquement cette année, pour célébrer son mariage avec son épouse, et passer quelques mois avec la famille. Malheureusement, nous l’avons perdu très tôt ». Et d’ajouter que, «aujourd’hui, je m’en remets à Dieu. Cet homme n’avait de problème avec personne. Il entretenait de bonnes relations avec tout le village. Aujourd’hui qu’il est parti, nous demandons que justice soit faite dans cette affaire, et que l’enquête soit menée pour mettre la main sur les coupables ».
Les fracassantes révélations de la mère de la victime
Effondrée par ce crime odieux qui a frappé son fils, la maman de Sally Sakho, n’a pas caché son indignation, et interpelle les plus hautes autorités du pays pour que la lumière soit faite dans cette affaire. « Mon fils ne méritait pas de mourir ainsi, encore moins en de pareilles circonstances », désole-t-elle, les larmes aux yeux. Abattu à coups de fusil puis abandonné, seul avec son ami en pleine brousse, gisant dans une mare de sang, c’est ainsi que les habitants du village de Kouthia Couroumba l’ont découvert, sur une piste qui mène vers leur village et d’autres par contre n’ont vu que son cercueil s’ébranlé vers le cimetière de Kouthia Couroumba. Très amère, la maman a finalement été sommée par son époux de se calmer… Avant de reprendre sa voix cassée et attristée, « qu’on le veuille ou pas, les meurtriers de mon fils, Sally Sakho, sont venus de Tambacounda, à bord d’une voiture 4x4 de couleur grise. Ils sont venus le tuer, et ils sont repartis vers Tambacounda après leur forfait ». Poursuivant que « (son) fils est un Sénégalais bon teint. Ses parents et arrières grands parents aussi sont des Sénégalais hors pair ». Elle finit par s’interroger : « Pourquoi de tels actes sur lui et son ami ?» A l’en croire, « mon fils et son ami Doro étaient à bord de leur moto, et ont dépassé le véhicule 4x4 garé au bord de la route à hauteur du village de Bakélibougou. Les passagers de la voiture auraient poursuivi mon fils et son ami, avant que des coups de feu ne soient entendus. Ils ont contourné le village pour prendre la route qui mène vers le cimetière ». Selon la mère de la victime, « l’un des passagers, qui était assis sur le siège d’arrière, portait des dreadlocks, et avait des lunettes noires ». Aujourd’hui que tout le village et environs est sous le choc, la maman de Sally interpelle les autorités sur cette affaire, « je dis à tout le monde, même au président de la république que j’ai mal au fond de mon cœur, et je continuerai toujours à pleurer mon fils qui était mon seul soutien. Je demande que les coupables soient arrêtés et punis ».
L’enquête de la gendarmerie bat de l’aile, malgré les pistes avancées
Beaucoup de pistes se dégagent dans cette « affaire Sally Sakho », qui continue de défrayer la chronique dans la région orientale, et plus particulièrement dans le village de Kouthia Couroumba et ses environs. Si certaines sources mettent en avant la jalousie, les amis de la victime parlent d’un règlement de comptes. Par contre, d’autres avancent les deux thèses à la fois. En tout état de cause, l’enquête menée par la Brimixte de la gendarmerie de Tambacounda nous permettra d’en savoir plus. La victime était très courageuse et dynamique. Réputé très actif, c’était un homme qui ne rechignait pas à travailler dur, et à la sueur de son front, pour venir au secours de la famille. La première piste de l’enquête menée, fait état d’un autre individu suspect habitant dans le même village. Ce suspect dont la mine et gestes avaient fini de surprendre plus d’un à l’enterrement du jeune émigré parti à la fleur de l’âge. Nos sources avancent que cet homme suspect, serait en parfaite collaboration avec les malfaiteurs tueurs de l’émigré et de son ami mécanicien, et est à chaque fois sollicité dans le village pour retrouver un animal volé. Malgré les multiples thèses avancées, du côté de la gendarmerie, l’enquête suit son cours, et des personnes sont actuellement passées à table pour les besoins de l’audition dans cette affaire. Selon une source proche de la gendarmerie, l’enquête suit des pistes pour mettre la main sur les meurtriers. En tout cas, du côté de la famille de la victime, rencontrée le samedi, la lenteur d’enquête menée par la gendarmerie ne jouerait pas en faveur de la famille, qui veut coûte que coûte que la vérité éclate dans ce crime odieux. Quel a pu être le mobile du crime? Les réponses fusent de partout.
Les projets de la victime hypothéqués
« Sally Sakho ne voulait pas du tout rester en France. Venir faire quelque chose de concret dans son village faisait partie de ses ambitions », souligne sa maman, Bouthiné Sakho. Seulement ses projets seront hypothéqués, selon Mme Sakho. « Car, il était notre seul soutien. Celui qui venait à notre secours, quand le besoin se faisait sentir. L’annonce de sa mort a tout bouleversé, même ses projets ». Et de poursuivre, « regardez ce bâtiment qu’il a commencé à construire », montrant du doigt un bâtiment à l’entrée de la maison, en voie de construction. « Il ne restait que la finition. D’ailleurs, quand il est revenu au bercail pour des vacances, le maçon avait redémarré les travaux du bâtiment », confie Mme Sakho. Visiblement très affectée par la mort de son fils aîné, Mme Bouthiné Sakho reste optimiste quant à l’arrestation des meurtriers. Une mort qui a plongé son entourage dans un profond tourment, et une grande tristesse. Sally Sakho côtoyait beaucoup de gens, surtout ceux de son village, ses environs, et même en France où il avait élu domicile.
ASSANE DIALLO
Source: L'office